Les influenceurs ont-ils pris l’IA en otage ?
Avez-vous remarqué à quel point tout le monde semble disposer d'un doctorat en data science ces derniers temps ? Dans cet épisode d'AI Experience, Julien Redelsperger reçoit Léo Bourrel, CEO d'IALab, une agence dédiée à l'accompagnement des entreprises en intelligence artificielle. Ensemble, vous allez découvrir comment différencier les véritables experts des pseudo-influenceurs. Léo Bourrel partage ses réflexions sur l'engouement actuel autour de l'IA, les dangers de l'information erronée, et comment utiliser l'IA de manière utile et efficace dans votre entreprise. Ne manquez pas cette conversation essentielle pour naviguer dans le paysage complexe de l'IA aujourd'hui et vous extraire du FOMO savamment entretenu par les pseudo-influenceurs sur LinkedIn.
Leo Bourrel est le CEO d'IALab, une agence dédiée à l'accompagnement d'entreprise en intelligence artificielle. Après plusieurs passées à développer des solutions en tant que data scientist, il a créé IALab avec pour objectif de démocratiser l'IA dans les entreprises.Leo est également président de l'association Lyon Data Science qui créer des évènements autour de la data et des métiers connexes.
Léo Bourrel
Data Scientist et CEO
Julien Redelsperger : « Et pour cela, j'ai le plaisir d'être accompagné par Léo Bourrel qui est Data Scientist et CEO d'IA Lab, une agence qui est dédiée à l'accompagnement d'entreprises dans le domaine de l'intelligence artificielle. Alors avec Léo, on va essayer de remettre un peu les pendules à l'heure aujourd'hui quand on parle d'IA parce que sur LinkedIn en particulier, on peut avoir l'impression que tout le monde soudainement détient un PhD en Data Science tellement il y a d'experts autoproclamés qui ont soudainement découvert que l'IA existait avec la sortie de JGPT. Aujourd'hui, nous allons donc parler des influenceurs d'IA ou des pseudo-influenceurs mais aussi des vrais Data Scientists de ce que l'IA peut faire réellement ou ne pas faire et surtout de savoir comment aller au-delà du buzz pour utiliser l'IA de manière utile. Bonjour Léo, merci de participer à cet épisode d'AI Experience. Comment vas-tu ? »
Léo Bourrel : « Écoute, ça va très bien. Merci beaucoup de m'avoir invité. Je suis ravi d'être sur ce podcast. »
Julien Redelsperger : « Un grand plaisir. Alors peut-être est-ce que tu peux te présenter en une minute avant qu'on attaque ce podcast. Qui es-tu Léo et que fais-tu ? »
Léo Bourrel : « Bien sûr. En une minute, moi je suis un Data Scientist de formation donc j'ai vraiment commencé à travailler les mêmes noms de code. J'ai fait ça pendant à peu près 6-7 ans. J'ai fait 4 années en freelance avant de monter l'agence IALab que je dirige aujourd'hui. Comme je disais, je m'appuie sur des compétences très techniques. Aujourd'hui, j'accompagne les entreprises pour qu'elles puissent avoir ces compétences de manière externalisée. Et en dehors de tout ça, je suis aussi président de l'association Lyon Data Science qui comme son nom l'indique, essaie de promouvoir la data dans la ville de Lyon. »
Julien Redelsperger : « D'accord. Donc l'IA, toi tu connais bien évidemment. C'est un sujet qui, comme tu le sais, n'est pas nouveau. Contrairement à ce qu'on peut penser. Ça existe depuis 50-60 ans, voire plus. Et pourtant, c'est la chose dont on parle le plus en ce moment. On ne parle que d'IA. Ma première question pour toi est simple. Que penses-tu de l'engouement actuel autour de l'IA ? Est-ce que tu penses que c'est justifié ou est-ce que c'est quand même un peu too much ? Est-ce que c'est un peu exagéré parfois ? »
Léo Bourrel : « Moi je suis plutôt du plan c'est un peu too much. C'est très très cool, on a vraiment beaucoup de choses qui sont construites. En fait, cet engouement il vient de la vague IA générative. Donc il y a énormément de choses qui sont nouvelles, qui apportent un peu un nouveau regard sur le monde de l'IA. Ce sont des choses qui avant justement étaient hyper techniques, qui maintenant se simplifient. On a des nouveaux usages, on a des nouvelles choses qui apparaissent tous les jours. On a l'impression que ça va à une vitesse incroyable. Et pour ça c'est trop cool. Vraiment on est dans un écosystème qui va très vite et qui évolue de jour en jour. Donc pour ça c'est trop bien. De l'autre côté, je trouve qu'on a un peu aussi un contre-coup. On a tendance à imaginer que l'IA c'est la solution à tout et qu'il faut mettre de l'IA de partout. Moi je suis un peu plus réservé de ce côté-là. Je pense que les entreprises ont intérêt à utiliser de l'IA quand c'est réellement intéressant pour elles. Utiliser de l'IA pour utiliser de l'IA c'est cool. Ça fera peut-être avoir un peu plus d'argent de la part de vos investisseurs si vous êtes une startup. Mais en dehors de ça, ça ne vous servira pas forcément à grand chose. Donc je suis un peu entre les deux. Dans le sens où vraiment on a une révolution, on a une évolution d'une technologie qui est hyper intéressante. De l'autre côté, il faut prendre un petit peu des pincettes et savoir comment l'utiliser et ne pas l'utiliser à tort et à travers pour dire qu'on fait de l'IA. »
Julien Redelsperger : « Quand toi tu parlais d'IA à ton entourage avant novembre 2022 et quand tu parles d'IA à ton entourage aujourd'hui, est-ce que tu as noté une différence avec la sortie vraiment de ChatGPT ? »
Léo Bourrel : « Complètement. C'est un truc assez fort. Déjà j'ai fait des études de data scientist. Quand on parle de data science pour une personne qui n'y connaît rien, c'est un peu abstrait. Avant on pouvait dire ça. De toute façon quand on parlait d'intelligence artificielle avant, les gens ne comprenaient pas trop non plus, ça ne leur parlait pas, c'était assez flou. Donc tout le monde disait on est un data scientist. Et de toute façon les gens ne comprenaient pas trop, ils ne posaient pas trop de questions et ça s'arrêtait là. Maintenant quand je dis que je travaille dans l'intelligence artificielle, j'ai beaucoup plus de gens qui comprennent et même les gens qui ne savent pas ce qui se passe derrière, en fait c'est pas grave, ils en ont tellement entendu parler partout qu'ils savent que du coup c'est le bon endroit où il faut être. J'ai des personnes qui me disent "ah bah super, tu m'as monté une entreprise là-dedans, ça doit marcher pour toi". Oui oui, la boîte se porte bien mais en fait il n'y a pas que ça. Mais non, vraiment ça a changé le regard un peu des gens sur le métier et vraiment les gens comprennent beaucoup plus, peut-être pas ce que je fais au quotidien, mais en tout cas le domaine d'activité arrière. »
Julien Redelsperger : « D'accord. Alors on s'est croisés à plusieurs reprises sur LinkedIn et je me souviens d'une tribune que tu avais partagée, un peu un coup de gueule en disant "stop, il y en a marre que des gens qui ne sont pas data scientists ou qui sont des influenceurs ou qui ont découvert l'IA avec JGPT se réclament quelque part de la data science". Est-ce que tu partages toujours cette tribune ? Est-ce que tu es toujours dans le même état d'esprit ? Et pourquoi ? Qu'est-ce qui t'a amené à écrire cette publication à la part de ta vie ? »
Léo Bourrel : « Je suis toujours dans le même état d'esprit. Avec l'intelligence artificielle générative, on a quand même une grosse vague de personnes qui sont arrivées, qui sont prétendues experts du jour au lendemain. Mais c'était un peu pareil il y a quelques années avec les NFT, avec tout ça. On a l'impression que... »
Julien Redelsperger : « Le métavers, on a vu plein de choses avant. »
Léo Bourrel : « Exactement. On a eu des technologies qui mettent des années à popper, à apparaître. On a des jeunes ingénieurs qui passent du temps derrière, qui travaillent, travaillent, travaillent pour arriver à sortir un jour quelque chose qui fait vraiment un gros buzz. Et à partir de ce moment-là, on a l'impression qu'il y a une foule de personnes qui viennent et qui se disent "ok, c'est le truc du moment". Donc, ils se mettent sur cette opportunité-là, ils font des formations et ils font que ça à longueur de journée. Aujourd'hui, si tu me demandais si j'avais toujours la même vision, je pense quand même qu'on commence à avoir un peu de recul avec ChargeDGPT. Ça fait deux ans que ChargeGPT existe. Il y a des personnes qui se sont formées, qui ont appris, qui ont découvert, qui maintenant partagent. Et ça, je trouve ça hyper intéressant. Mais elles sont vraiment dans le partage. Moi, ce que je critique un petit peu dans ce post-là, c'est vraiment les personnes qui sont arrivées deux mois après ChargeGPT, qui ont dit "voilà, je suis expert AI et regardez comment on fait de l'AI, il faut utiliser ChargeGPT". C'est un peu plus complexe que ça l'IA. C'est pas que ChargeGPT, c'est beaucoup d'outils, c'est beaucoup de choses, beaucoup de compétences qu'il faut avoir. Et se prétendre expert AI, je trouve que c'est un peu réducteur pour les personnes qui travaillent vraiment, qui sont vraiment ingénieurs dans ce métier-là. »
Julien Redelsperger : « Oui, parce que tu as beaucoup d'influenceurs qui te disent que l'IA, c'est une solution miracle. Avec l'IA, tu vas faire x10 sur ton business. Avec l'IA, tu vas conquérir le monde. »
Léo Bourrel : « Exactement, mais c'est aussi cette partie-là que je critique beaucoup parce qu'en fait, à la limite, une personne qui se dit "je vais vous former sur ChatGPT" et c'est juste ça, c'est ok. Même si tu n'as pas l'expérience avant, si tu es juste très fort sur ChatGPT, on a entendu un peu parler du métier de Prompt Engineering. »
Julien Redelsperger : « Pourquoi pas ? »
Léo Bourrel : « Moi, je veux bien y croire que les gens soient très forts pour ça. La seule chose qui me dérange un petit peu plus, c'est les personnes qui te disent "tu vas faire x10 sur ton CA, tous les business vont changer, c'est la révolution du jour au lendemain, tu ne reconnaîtras pas ton business, tu vas pouvoir licencier tous tes salariés parce qu'en fait, ce que tu fais aujourd'hui avec 20 personnes, tu pourras le faire demain tout seul". C'est un peu du pipo, c'est un peu exagéré si ce n'est pas énormément exagéré. Et en fait, c'est un peu ce côté-là que je critique, carrément ce côté-là que je critique parce que je trouve qu'il fait du mal aussi à tout l'écosystème de manière générale parce que les personnes qui n'y connaissent rien et qui y croient, pour elles, ce sera un peu une désillusion plus tard parce qu'elles vont payer une formation, je ne sais combien, et derrière ça va se retrouver avec un ChatGPT qui peut faire du contenu, qui peut faire des choses, mais qui ne changera pas profondément ton entreprise et qui va se dire "bon ben voilà, je ne réinvestis pas dans l'IA, je ne mets plus de billes dans l'IA parce que le premier truc que j'ai fait, c'était du flan et il n'y a rien derrière". »
Julien Redelsperger : « Tu penses qu'il y a des risques vraiment que les gens se désintéressent de l'IA parce qu'il y a eu des déceptions ou des mauvaises expériences avec des gens qui ne maîtrisaient pas le sujet ? »
Léo Bourrel : « Ça peut être un risque. Est-ce que c'est avéré ? Je ne sais pas. Je n'ai pas eu de personnes qui m'ont dit "moi j'ai fait une formation, c'était un échec, je n'ai pas pu l'implémenter de mon côté et derrière du coup je ne veux pas réinvestir dans l'IA". Je n'en ai pas connu. J'ai connu des personnes qui m'ont dit "j'ai suivi des formations de personnes qui ont fait des formations dans l'IA alors qu'ils n'y connaissaient rien et ça se sentait", mais je pense que c'est plus dans mon entourage, j'ai beaucoup de profils techniques qui sont allés voir un petit peu ce qu'ils faisaient aussi à droite à gauche et qui disaient "en fait il n'y a pas de fond, la forme elle est super, c'est trop bien mais il n'y a pas de fond et à part utiliser le charge d'IPT avec le bon prompt à la bonne chose, ils ne disaient rien de particulier". Je trouve ça un peu dommage, je pense que ça peut avoir un effet négatif à terme. »
Julien Redelsperger : « Donc avant tout des bons communicants. »
Léo Bourrel : « Exactement. »
Julien Redelsperger : « C'est vrai que ces influenceurs on les voit beaucoup sur les réseaux sociaux mais comme tu dis ce n'est pas des experts, ce n'est pas des data scientists la plupart du temps. Par contre ils ont quand même une vertu, c'est celle de démocratiser l'intelligence artificielle, de l'expliquer notamment au grand public mais surtout aux chefs d'entreprise, aux dirigeants qui sont très loin de comprendre ce que c'est et quels sont les impacts. Ça peut être quand même quelque chose de positif ça non ? Qu'est-ce que tu en penses ? »
Léo Bourrel : « Oui complètement et c'est pour ça que je ne veux pas critiquer à 100% les personnes qui font des formations en IA parce qu'il y a des personnes qui ont clairement des connaissances et même si ce ne sont pas des data scientists de formation qui ont quand même des connaissances sur comment ça fonctionne, c'est quoi les usages, c'est quoi les technologies, c'est globalement comment tout ça fonctionne. Donc il y a quand même du positif aussi, il ne faut pas voir tout le négatif là-dedans et notamment je pense qu'un des gros impacts positifs c'est la culturation que ça amène. Aujourd'hui moi je fais quand même quelques petites conférences, quelques talks, des choses comme ça. En fait je me rends compte que dans le public j'ai toujours les mêmes questions. Ces questions ça va être ok mais qu'est-ce qu'on fait de mes données, comment je peux faire pour l'utiliser sans risquer de tout donner à OpenAI, Microsoft, peu importe. En fait toutes ces questions-là, moi j'ai les réponses mais je pense que même une personne qui n'a pas forcément le background technique derrière, elle peut y répondre parce que c'est juste des questions d'usage. Et tout ce travail-là effectivement c'est de la culturation, c'est de la formation un petit peu à ces outils. Et ça, ça a beaucoup de valeur parce que pour un entrepreneur, pour un salarié, pour un peu tout le monde, ça permet de digérer un peu toute l'information et de savoir un petit peu qu'est-ce qui est bon et qu'est-ce qui n'est pas. »
Julien Redelsperger : « D'accord. Toi qui es au contact de manière assez régulière avec des entreprises, avec des dirigeants, qu'est-ce qu'ils te disent quand tu parles d'intelligence artificielle ? Quel est leur niveau de maturité ou d'inquiétude ? C'est quoi leur état d'esprit à eux ? »
Léo Bourrel : « C'est assez particulier parce qu'il y a un grand écart aujourd'hui qui se fait. Au début j'avais un peu une vision, c'était un peu un cliché. Moi je me suis dit que les startups vont être hyper en avance et les grands comptes vont être hyper en retard. Ce n'est pas du tout le cas. C'était un peu une surprise pour moi mais en fait globalement ça dépend vraiment des personnes. On a des personnes qui sont hyper en avance sur l'IA, qui vont avoir des idées hyper intéressantes, qui vont vouloir faire des projets très cool vraiment avec une vision de très bon terme. Et ça c'est très cool pour nous parce que travailler avec des personnes comme ça c'est limite notre job à ce moment-là c'est un peu de les ralentir, de leur dire "piano piano si vous voulez faire plein de choses c'est cool mais d'abord il faut commencer avec des bases solides". Mais de notre côté on a aussi beaucoup de personnes qui ont très peur, qui ont très peur pour plein de raisons. Comme je disais tout à l'heure il y a vraiment un enjeu avec la sécurité des données, avec l'usage des données qui est fait par des entreprises tierces. Donc ça c'est vraiment je pense le frein qui revient le plus. Et après le frein qui revient un petit peu moins mais qui pour moi a beaucoup plus d'importance ça va être le frein sur la transition des entreprises, des salariés, la gestion du changement en fait qui est hyper importante parce que si demain on rajoute un process d'automatisation, d'IA etc. et que ça enlève une certaine mission à une personne, potentiellement cette personne va se dire "ok j'ai une de mes tâches qui est automatisée, est-ce que mon travail n'est pas en danger ?" En fait tout ce travail là d'aller rassurer un petit peu ces personnes, essayer de trouver qu'est-ce qu'elles aiment faire, quelles sont les compétences, comment on peut essayer de leur trouver des nouvelles choses à faire, des nouveaux... Soit les compétences qu'elles ont déjà, soit des formations pour les accompagner vers un nouveau métier. En fait ça c'est du management de transition, de la gestion du changement et c'est hyper important parce que vraiment il y a beaucoup d'entreprises qui ont besoin d'être accompagnées sur ces sujets là. Je pense que c'est encore assez rare d'avoir ce type d'accompagnement et pourtant c'est peut-être clé dans beaucoup de cas. »
Julien Redelsperger : « Et ça c'est aussi le rôle du data scientist, d'accompagner les clients sur le changement. On a l'impression que quelque part tu passes de la hard tech, la data etc. à côté un peu sciences sociales, accompagnement, psychologie... »
Léo Bourrel : « Oui mais en fait ça fait partie du métier de data scientist. Au fond, data scientist, tu as vraiment des hard skills, comme tu dis, où ça va être très technique, développer en python, utiliser tel ou tel langage de programmation, telle librairie, tel outil etc. C'est vraiment des mathématiques, des choses comme ça, c'est vraiment des hard skills. Mais il y a une très grosse partie du métier qui est les soft skills. Moi je le vois beaucoup parce que je travaille beaucoup en externe avec des entreprises, donc on doit les accompagner sur ces sujets là. Et même en interne, une des grosses parties du métier c'est d'aller comprendre le besoin, d'aller le structurer, d'aller faire en sorte qu'on n'ait pas juste à prendre... Enfin, ça n'arrive pas qu'on nous dise "voilà le projet que tu veux développer, tiens je te le laisse et on se revoit dans trois mois pour voir le résultat". Ça marche jamais comme ça, on est quand même, selon les projets, je ne vais pas dire de la recherche, mais on s'approche un petit peu sur du développement où on ne connaît pas forcément 100% de résultats à la fin. Donc le travail du data scientist, il y a beaucoup de soft skills pour aller comprendre le projet, comprendre les besoins, comprendre les utilisateurs. Une fois qu'on a fait ce travail là, qu'on commence à développer quelque chose, essayer d'intégrer le plus les clients, que ce soit des clients externes ou des clients internes, et les faire adhérer au projet. L'idée c'est de leur dire, ce n'est pas d'arriver et poser une brique dans trois mois pour leur dire "ben voilà on a fait le lien, regardez c'est un super outil, maintenant toi tu n'as plus de travail, toi tu n'as plus de travail, et puis toi on ne t'a pas trop mis au courant, mais en fait ça va aussi pas mal changer ton travail, donc il va falloir que tu t'habitues et c'est comme ça". Ça, ça ne marche pas. Globalement, on a des projets comme ça, c'est un flop tout de suite. Donc le travail du data scientist, effectivement, c'est aussi d'aller faire adhérer les gens, les faire comprendre quel est l'intérêt pour eux, et aussi comprendre souvent le métier final. Parce que souvent les commanditaires ne sont pas les personnes qui vont utiliser le projet à la fin. Souvent on va voir du C-level qui va nous dire "ben voilà on veut utiliser l'IA parce qu'on veut être meilleur sur telle activité, sur tel service de la société". Trop bien. Mais avant de vous interviewer, avant de comprendre ce que vous voulez faire, je vais aller voir d'abord les équipes, je vais leur poser des questions, comment se déroule leur quotidien, où est-ce qu'ils perdent du temps, où est-ce qu'ils gagnent du temps, et à ce moment-là du coup on devra avoir un projet, en tout cas une idée du projet, on le fait valider par le C-level, et ensuite on avance. »
Julien Redelsperger : « Et justement est-ce que tu peux donner quelques exemples peut-être un peu concrets de projets sur lesquels tu travailles, ou d'entreprises que tu accompagnes ? »
Léo Bourrel : « Oui bien sûr. En entreprise on travaille quand même pour pas mal de boîtes, on va dire que les... On a quelques exemples, moi que j'aime bien, j'ai Planity de mon côté qui est une entreprise qui fait un peu comme Doctolib mais dans le monde des instituts de beauté, des instituts de soins, donc tout ce qui va... »
Julien Redelsperger : « Donc prise de rendez-vous pour... »
Léo Bourrel : « Exactement, prise de rendez-vous. Et pour eux en fait ils ont une force commerciale, je crois que c'est à peu près 300 commerciaux, en France et en dehors dans les autres pays, et en fait pour chacun des commerciaux ils doivent aller dans le magasin, remplir toutes les prestations à la main, et catégoriser chacune des prestations dans le référentiel Planity. L'idée c'est d'être capable de dire, si je vais chez le coiffeur à côté, je remplis coiffure homme effet métallisé, je ne connais rien, je ne sais pas si on se trompe, mais ça va rentrer dans la catégorie coiffure homme. Et ça c'est hyper important de faire ce travail-là parce que derrière, pour Planity, une fois que vous allez sur le site internet, que vous tapez sur Google "je veux une coiffure homme", Planity va se placer en premier et va afficher chacun des salons qui proposent cette prestation-là. Donc il y a un gros sujet de référencement derrière, et en même temps pour les commerciaux qui font ça sur le terrain, c'est assez pénible parce qu'ils doivent le faire manuellement, ils ont une liste de 50-plus de catégories qui va potentiellement bouger parce qu'il y a aussi des nouvelles choses qui arrivent. Et d'un service à un autre, ce n'est pas toujours évident de savoir où est-ce qu'on va le catégoriser. Donc parfois on a deux fois le même service qui vont être dans deux catégories différentes, ou un service qui va être dans plusieurs catégories, bref c'est un peu un panique à bord. Donc là pour eux, ce qu'on a fait c'est qu'on a essayé de tout nettoyer, en tout cas une grande majorité des erreurs qu'on a pu nettoyer, et ensuite de ça on a créé un petit outil qui catégorise automatiquement les prestations, les services. De cette façon-là, ça fait gagner un petit peu de temps aux commerciaux, et en plus de ça on garantit, on améliore la qualité des données et le résultat positif final via l'ESIO. »
Julien Redelsperger : « Et il y a déjà eu des résultats concrets ? T'as eu des retours de clients ? Est-ce que ça a changé leur manière de travailler ? »
Léo Bourrel : « Je ne sais pas si ça a changé leur manière de travailler, je pense que c'est plus une amélioration de fond, dans le sens où comme je te disais, ça améliore l'ESIO, alors ça améliore en fait la qualité des pages qui vont s'afficher sur l'ESIO, ça va éviter les erreurs, et ça accélère un petit peu le travail des commerciaux. Après je pense que ça leur accélère cinq minutes par vente. Je ne suis pas sûr que ça leur ait changé la vie, maintenant si on rapporte au volume de cinq minutes, imaginons qu'on a 10-20 par vente par commerciaux, ça fait 300 fois 10, ça commence à faire un peu du volume. Donc je n'ai pas eu, on n'a pas mesuré l'impact de cette feature-là, d'ailleurs on aurait dû, mais effectivement ça a eu un impact je pense assez positif. »
Julien Redelsperger : « D'accord, et tu travailles principalement avec des PME, des grosses entreprises, c'est quoi un peu la typologie de tes clients ? »
Léo Bourrel : « Techniquement on travaille un peu avec tout, on a commencé beaucoup sur de la startup, et en fait au fur et à mesure on a eu des opportunités dans d'autres types d'entreprises. En ce moment on travaille un petit peu avec des collectivités, avec des écoles publiques type la Sorbonne, des choses comme ça, ou des très grands comptes comme il y a un an et demi on a travaillé avec Enedis. Donc on a souvent des opportunités, on a eu plusieurs types d'entreprises, et aujourd'hui finalement l'idée ce n'est pas de se concentrer sur une taille d'entreprise, c'est plutôt de dire on est un expert sur une technologie et on va essayer de la diffuser, pas au plus grand nombre mais en tout cas à toutes les entreprises qui les nécessitent. »
Julien Redelsperger : « Et quelles sont les raisons qui poussent un client à venir te voir ? Pourquoi est-ce qu'elles viennent dire on a besoin d'un expert en IA, alors que ces grands groupes notamment pour avoir les compétences en interne finalement ? »
Léo Bourrel : « Oui bien sûr, je pense qu'il y a plusieurs choses, c'est qu'on a une méthodologie de travail qui fait que comme je te disais tout à l'heure, on ne se contente pas des hard skills et on va chercher un petit peu au-delà. Ce qui fait que quand on a des entreprises qui sont au niveau C-level ou en tout cas comité de direction ou des profils comme ça, ils savent qu'il faut faire une transition vers l'IA par moment, ils ne savent pas forcément de quelle façon de faire, ils ne savent pas forcément de quel type de profil ils ont besoin aussi parce qu'on parle beaucoup de data scientist mais il y a aussi tous les métiers qu'il y a à côté, data analyst, data engineer, MLObs, il y en a beaucoup. Tous ces métiers-là, c'est vrai que c'est un peu compliqué pour une entreprise de savoir comment se positionner, où est-ce qu'on veut aller. Donc je dirais que ça c'est la raison principale, après pour moi il y a deux autres raisons. Pour les plus petites entreprises, c'est ceux qui n'ont pas forcément la volonté d'internaliser la compétence et d'avoir un data scientist à temps plein dans la société. Donc on vient de manière un peu plus ponctuelle, enfin sur du long terme, mais ponctuelle. Pour les entreprises, c'est plus facile de se projeter, de dire voilà on commence par un projet, on teste, ensuite on va sur un second, ensuite ça fonctionne, on va sur un troisième, etc. On voit qu'il y a beaucoup évolué depuis évidemment longtemps, mais notamment quand on parle d'IA générative avec ChatGPT, on est passé de la version 3.5 à la version 4.0 ces derniers temps. En quoi est-ce que cette évolution rapide impacte ton travail ou impacte les demandes et les besoins des entreprises ? »
Léo Bourrel : « C'est un réel impact qui est assez complexe parce qu'en fait on a envie de développer des choses avec tout ce qu'on a aujourd'hui et parfois on se rend compte que si on faisait trois mois plus tard, on aurait complètement d'autres moyens et on pourrait faire beaucoup plus de choses. Je vais te donner un exemple rapide, on a fait un projet pour une boîte qui voulait faire de la détection d'entités, donc la détection d'entités c'est le fait d'aller chercher des noms, des adresses, des RIB, bref tout ce qui est un petit peu structuré dans le texte. On a fait ce travail là, il y avait des contraintes un peu particulières, donc on l'a fait sur des modèles qui ne sont pas des modèles ChatGPT, on a fait des plus petits modèles qui sont un peu plus anciens mais qui sont quand même très performants. Et on a eu un autre client qui avait à peu près le même besoin mais qui lui n'avait aucun enjeu de sécurité, qui voulait passer par ChatGPT pour avoir les meilleures performances, en tout cas OpenAI. Et la complexité du code, on a vu quelque chose qui s'utilisait il y a plutôt une méthodologie de travail d'il y a deux ans versus une méthodologie de travail d'aujourd'hui, les résultats sont quand même assez impressionnants de le voir après. Aujourd'hui en quelques jours on a un résultat qui est solide, qui nous donne des bonnes performances et où effectivement on a quand même bien réduit la complexité du développement. »
Julien Redelsperger : « Est-ce que ça change la manière de travailler mais également de former tes équipes ? Comment est-ce que tu te tiens à jour de ces nouveautés, de ces nouvelles techniques, de ces nouvelles manières de fonctionner ? »
Léo Bourrel : « C'est assez difficile de rester à jour de tout. Souvent on va avoir des personnes qui vont avoir des impétences, par exemple on peut avoir une personne qui adore le NLP. En ce moment le NLP est devenu un domaine tellement vaste que c'est compliqué de suivre rien que le NLP. »
Julien Redelsperger : « NLP, Natural Language Processing, c'est la capacité de l'IA à comprendre et à interpréter le langage. »
Léo Bourrel : « Exactement, c'est tout à fait ça. Et du coup l'idée c'est qu'on va avoir des personnes qui vont avoir certaines compétences qu'on va essayer de faire progresser sur un domaine en particulier. À l'inverse du NLP, on a le Computer Vision, le traitement de l'image, images, vidéos, etc. On va avoir des compétences qui vont être parfois très semblables mais parfois très différentes. Aujourd'hui, quand j'ai commencé, on pouvait être expert un petit peu de tout et tant qu'on faisait de la Data Science, on avait toutes les compétences. On allait un jour sur le NLP, le lendemain sur le Computer Vision, le lendemain sur un autre type de projet et c'était ok. Aujourd'hui c'est beaucoup plus compliqué. On a des projets qui sont de plus en plus complexes, qui demandent des compétences techniques de plus en plus importantes. Même si on simplifie parfois l'usage avec des outils comme l'LLM, en réalité il y a toujours beaucoup de choses à faire derrière. Si je prends l'exemple de l'LLM, il faut faire de l'évaluation. Est-ce que ce que donne le chatbot, l'LLM, est correct ou pas ? Si jamais demain OpenAI est en panne, qu'est-ce qu'on fait ? Sur du LLM par exemple, on devient sur un vrai métier d'ingénierie plutôt que sur un métier de Data Science en partie. Ça ne veut pas dire que c'est 100% le même métier qui change, mais il y a une partie du métier qui change quand même. Malgré tout, il faut quand même garder les compétences qu'on a à l'origine parce que l'LLM ne répond pas à tous les problèmes non plus. Donc en fait il y a un peu une ambivalence où on va essayer d'aller chercher de plus en plus de connaissances, de plus en plus de nouveautés, mais il ne faut quand même pas oublier les bases et rester toujours un peu sur ce qu'on a appris à l'école. »
Julien Redelsperger : « Quand une entreprise cherche un expert en intelligence artificielle, quels conseils tu pourrais leur donner ? Comment est-ce qu'on fait pour reconnaître un véritable expert, d'un pseudo expert en IA mais qui est très bon communicant ? Je ne dis pas que les vrais experts ne sont pas bons communicants. »
Léo Bourrel : « Oui, mais en même temps, ce n'est pas très faux non plus. Malheureusement, les meilleurs communicants ne sont pas les experts, les experts ne sont pas les meilleurs communicants. Ce n'est pas une réalité absolue, mais je pense qu'on se remarque quand même pas mal. Maintenant pour identifier des personnes compétentes, je dirais qu'il n'y a pas de secret. Pour moi, il faut regarder un petit peu le CV, il faut voir un petit peu sur quoi la personne a travaillé. Encore une fois, le domaine c'est très technique, c'est beaucoup de mots clés, c'est beaucoup de choses comme ça. Donc si vous ne comprenez pas un CV, ce n'est pas grave. Il vaut mieux aller parler à la personne, essayer qu'elle vous explique ce qu'elle a fait, et quitte à lui dire "je ne suis pas technique, explique-moi avec des images", en simplifiant un petit peu tout ça. Un vrai expert sera capable de le faire, alors que je pense qu'une personne qui a travaillé dans l'IA, qui est prompt engineer ou je ne sais pas trop quoi, lui, il aura plus de mal à trouver des cas d'usage concrets en entreprise, en dehors du "ça va accélérer votre rédaction sur LinkedIn" et d'autres petites choses comme ça, ou rédaction de blog. Et en plus de ça, souvent dans le CV, on voit que ce sont des profils qui n'avaient pas forcément les compétences avant, qui avant étaient dans le marketing, qui avant étaient dans le commerce, dans je ne sais pas trop quelle activité, mais pas forcément sur des métiers techniques. »
Julien Redelsperger : « En gros, école d'ingénieur ou école d'informatique, c'est un peu la base pour travailler l'IA de manière un peu technique ? »
Léo Bourrel : « Oui, je pense que oui. Honnêtement, c'est quand même un très gros signe que la personne a des compétences techniques. »
Julien Redelsperger : « Par rapport à une école de commerce, voire pas de diplôme du tout, même s'il peut y avoir des très bons autodidactes qui se sont formés. »
Léo Bourrel : « Exactement, en fait, il y a toujours des exceptions, c'est sûr et certain. Tu vois, j'ai en tête les personnes qui font des reconversions professionnelles. Tu peux avoir fait 15 ans dans le marketing et au fur et à mesure, tu vas être intéressé à la data un petit peu. Avoir fait une reconversion parce que tu fais de l'analyse dans le marketing, ça a du sens. Mais souvent, les personnes qui vont s'identifier comme ça, il va y avoir une suite logique dans le CV. D'abord, j'ai fait du marketing. Dans mon expérience de profil marketing, j'ai commencé à analyser des dashboards, à comprendre les données, à vouloir interagir avec elles. Et au final, ça m'a tellement plu que je suis allé sur un métier data analyst ou data scientist en marketing. Il y a une suite logique. Les profils pour moi qui sont un peu influenceurs IA, ça va être j'ai fait du commerce pendant trois ans, des sales pendant trois ans. J'ai vu en novembre 2022, OpenAI a sorti ChatGPT, super. Décembre 2022, j'étais expert en IA. Je caricature un peu, mais il y a quand même de l'intérêt dedans. »
Julien Redelsperger : « C'est à dire que l'IA, c'est un outil. Ce n'est pas parce que tu mets de l'IA quelque part que ça va transformer ou régler ton problème. »
Léo Bourrel : « Exactement. Le cas que je trouvais assez flagrant, c'était les services clients. Pendant très longtemps, on a vu des services clients boostés à l'IA qui sortaient un peu partout. Moi, j'ai des clients qui m'ont dit, nous, on a développé notre propre système de ticketing, de réception de messages et de choses comme ça pour nos clients, pour essayer de suivre un petit peu les problématiques de nos clients et essayer de les aider. Très bien. Maintenant, on va mettre de l'IA là-dedans pour accélérer la réponse. OK, super. Mais pourquoi vous perdez du temps sur votre réponse ? Parce qu'il faut aller accéder aux données. Mais du coup, l'IA, oui, elle aura accès aux données. Mais est-ce que déjà, dans votre application, vous donnez l'accès à vos conseillers, aux clients qui répondent ? Non, il faut qu'elles ouvrent l'application. Une autre application, qu'elles aillent chercher la base de données et l'information, il faut qu'ils demandent à quelqu'un d'autre. Et ensuite, ta ta ta, et ensuite, voilà. Donc, en fait, moi, je leur dis, c'est super, on peut faire de l'IA. Vous avez raison, vous avez les données en base, vous avez une interface graphique que vous gérez, donc on peut totalement se plumer au milieu et s'installer. Je n'ai aucun souci avec ça. Maintenant, je pense que la problématique, elle vient de votre process métier derrière. Et peut-être que si vous mettiez juste sur votre logiciel les données sur la droite avec un petit anchor qui dit, ça, c'était le client, il a passé comment, à telle date, il a ta ta ta, j'ai tout l'historique, j'ai toutes les infos. Peut-être que ça va déjà accélérer beaucoup, beaucoup, beaucoup le travail de vos conseillers. »
Julien Redelsperger : « Et c'est ce regard un peu extérieur que toi, tu apportes aux entreprises en leur disant, parfois c'est bien de commencer petit, sans forcément mettre de l'IA, puis après monter en puissance. »
Léo Bourrel : « Exactement. Moi, c'est quelque chose qui me tient beaucoup à cœur, c'est que je ne suis peut-être pas un très bon commercial du coup, mais j'essaie de m'efforcer. »
Julien Redelsperger : « Pratique en tout cas, c'est juste répondre au buzz. »
Léo Bourrel : « Exactement. Et surtout, j'essaie de conseiller mes clients pour qu'ils aient un peu la meilleure solution et pas qu'ils aient la solution qui me plaise le plus à moi. Parce que moi, je peux leur mettre de l'IA partout, je peux faire plein de choses. On peut faire des trucs qui sont vraiment cool avec de l'IA. Mais si en contrepartie, mon client lâche un gros montant et qu'il n'y a pas de retour sur investissement, à la fin, il ne sera pas content. Alors que si on lui trouve une solution, même si ce n'est pas moi qui l'implémente parce que ce n'est pas de l'IA, ce n'est pas dans nos capacités, etc. Le client, le jour où il aura besoin d'une IA, il viendra me voir. Et je pense que ça crée un peu une relation de confiance qui est hyper importante. »
Julien Redelsperger : « Alors, on parlait beaucoup évidemment de ChatGPT, d'OpenAI, mais l'IA, ce n'est pas que OpenAI et ChatGPT. Est-ce qu'il y a d'autres outils que toi, tu recommandes ou que tu utilises au-delà d'OpenAI qui peuvent être très utiles dans le monde de l'entreprise ? »
Léo Bourrel : « Oui, en fait, je différencie un petit peu deux types d'IA. Pour moi, il y a les services d'IA qui sont comme ChatGPT, etc. Ce sont des services accessibles en ligne où tout le monde peut y aller. Pour moi, c'est la première porte d'entrée de l'IA. Et après, il y a les produits que nous, on va développer. Vraiment, le Data Science, le fait d'aller développer des projets, etc. Donc, si on se concentre vraiment sur la partie services, pour moi, il y a deux, trois projets qui sont vraiment très cool. Je suis assez fan de Firefly, qui est un outil qui permet de prendre des notes pendant le rendez-vous. J'ai Firefly en tête parce que c'est celui que j'utilise. Il en existe peut-être une dizaine, je ne sais pas, une centaine. Ce sont des outils qui sont vraiment pratiques. Pourquoi ? Parce que normalement, au rendez-vous, on prend tous des notes et on doit se concentrer à la fois sur la personne qui nous parle, à la fois sur les notes. Moi, je mets toujours le focus en priorité sur la personne qui me parle, que je me rate un peu dans mes notes, j'oublie des choses. Ce n'est pas idéal. Je me retrouve avec des notes qui sont à moitié écrites sur une page un peu de travers, un peu dans tous les sens. Ce n'est pas top. Là, le petit comme Firefly, ça me permet de faire une transcription de tout ce qui a été dit à l'audio en texte. Ça me fait aussi des bullet points pour me dire, voilà, ça c'est sur le projet, les prochaines étapes, c'est de faire ci, c'est à ça. Ça me dit en gros quels ont été les grands chapitres de la discussion. Ce n'est pas parfait, mais en fait, je m'en moque un peu. Je ne veux pas que ce soit parfait, je veux juste avoir les grandes lignes pour que je puisse ensuite aller reprendre des notes manuellement et repasser un petit peu de temps sur tout ce qui a été dit. Donc ça, je trouve que c'est l'un des outils qui me sert le plus aujourd'hui. Et sinon, je découvre il n'y a pas très longtemps un outil qui s'appelle Gamma, je crois. »
Julien Redelsperger : « Oui, c'est pour des présentations en ligne. »
Léo Bourrel : « Oui, c'est pour des présentations en PowerPoint. Si vous êtes comme moi et que vous n'aimez pas faire ça, c'est idéal parce qu'en fait, vous expliquez un petit peu les grandes lignes. Ça va vous sortir un PowerPoint qui est très beau. En tout cas, j'ai fait un test dessus, je trouvais ça vraiment très joli. Je modifie tout le contenu pour dire, voilà, tel chapitre, ça ne correspond pas à ce que je veux, je veux ça, ça, ça, etc. Et en fait, au lieu de prendre une journée pour faire un petit PowerPoint qui va me servir dans une heure de présentation, j'ai pris peut-être deux heures, trois heures. J'ai pris le temps quand même de retravailler, de refaire plein de choses, etc. Mais on a quand même un gain qui est surtout sur la partie esthétique pour avoir quelque chose qui est très joli, très uniforme et qui a du sens. »
Julien Redelsperger : « D'accord. Et au niveau de ta gestion des projets, gestion des équipes, est-ce que tu utilises des outils à base d'IA ? Je peux penser à Notion, AI, ce genre de choses ? »
Léo Bourrel : « Alors, j'utilise Notion, pas trop la partie AI. Pour la gestion de projet, honnêtement, Firefly, du coup, parce que ça me permet de prendre les notes au fur et à mesure dans le suivi des projets. On a un sujet là, en interne, c'est justement d'améliorer la qualité des specs, des spécifications techniques en début de projet. Je voulais tester avec Notion, AI pour voir un petit peu ce que ça donnait, est-ce qu'on avait des meilleurs résultats ou pas. J'avoue, je ne sais pas encore. Pour l'instant, c'est dans les tuyaux. Mais effectivement, c'est un sujet qui est intéressant. J'aime aussi, je crois que Asana a sorti la version Asana AI. Ça fait partie des choses à tester dans les prochaines semaines. »
Julien Redelsperger : « Absolument. J'en profite d'ailleurs pour envoyer les auditeurs à un épisode consacré à Asana qui est sorti mi-juin. Si vous voulez tout savoir sur Asana et Asana AI en particulier, un outil de gestion de projet qui est assez génial, n'hésitez pas à écouter cet épisode. »
Léo Bourrel : « J'ai envie de l'écouter. »
Julien Redelsperger : « Exactement. Alors, Léo, l'IA, elle peut quasiment tout faire, ou presque en tout cas. On voit de l'IA dans la création graphique, dans la création vidéo. On parle d'IA dans le monde de la chirurgie, de la médecine, de l'architecture, etc. Est-ce que toi, il y a un cas d'usage ou un quelque chose qui te fait vibrer en particulier où tu te dis "Waouh, que ce soit dans mon domaine pro ou perso, ça, ça va vraiment être un truc qui va vraiment être super cool en termes d'IA"? »
Léo Bourrel : « Ouais, je pense qu'on a un truc qui est vraiment en train de monter, en train d'exploser en ce moment, c'est les agents, les systèmes d'agents d'IA. Et je suis profondément convaincu qu'il y a un réel usage à ça et qu'on ne l'a pas encore craqué. »
Julien Redelsperger : « Tu peux expliquer ce que c'est pour un agent en IA? »
Léo Bourrel : « Ça va être des petits programmes d'IA. En fait, c'est des petits bots qui vont être spécialisés dans une activité. Et en fait, on va pouvoir les programmer. La programmation d'agent, c'est au moins de dire... J'ai vu une démo il n'y a pas longtemps d'une personne qui programmait ses vacances comme ça. Et puis, l'input, c'était "je veux des vacances, j'hésite entre New York et Los Angeles, ce sera des vacances en mai, j'aime la nourriture mexicaine et les conférences à la tech. Dis-moi quel est le meilleur des deux options et réserve-moi les billets, fais tout ça". Et en fait, on voit l'IA qui, au fur et à mesure, prend l'information, va aller sur internet chercher des informations sur les activités qu'il y a à faire en mai, les conférences tech qu'il y a à faire en mai dans chacune des deux villes, qui va vraiment récupérer toutes les infos à chaque fois des villes, la météo, etc. Et qui va dire "ben voilà, selon tout ce que tu m'as dit, selon tes préférences, etc. Je te recommande d'aller plutôt à San Francisco. Est-ce que tu es ok avec ça? Oui, non". La personne écrit "oui". "Super". Et puis il dit "bon, maintenant je vais aller sur un comparateur de billets d'avion. Voici le moins cher. Si tu pars le dimanche à 18h et que tu reviens le mercredi à 15h, tu as le moment idéal pour prendre tes vacances le moins cher possible". Et en fait, il prépare tout ça et à la fin, tu as juste le lien pour prendre ton billet avec toutes les activités qui sont listées pour te dire "tu devrais faire ci, ça, ça". Et il y a une partie de moi où je trouve que l'usage, celui-ci, ce n'est pas un usage que je trouve incroyable dans le sens où "ok, c'est très cool, c'est une démo, mais personne ne va l'utiliser pour ça". Enfin, je ne pense pas. Mais je pense qu'il y a vraiment des choses à faire derrière qu'on n'a pas encore craqué. Qu'est-ce qu'il y avait à faire? Le jour où ce sera craqué, on saura que les agents, ça nous permet d'être un vrai assistant du quotidien pour telle, telle, telle tâche. J'aurais juste à dire "ben voilà, je viens de signer un contrat avec Julien, fais-moi tous les documents". Ils auront accès à mon notion, ils pourront récupérer toutes mes infos, les remplir tout seul, etc. Je pense que là, on aura vraiment un truc qui sera cool. »
Julien Redelsperger : « D'accord, parfait. Très bien. Ben écoute, merci beaucoup Léo. Alors à la fin de chaque épisode, l'invité du jour doit répondre à une question posée par l'invité précédent. En attendant d'écouter la tienne, je te laisse écouter celle de Benoît Sommerlad qui est expert en gamification et en ingénierie pédagogique. On écoute sa question. »
Benoît Sommerlad : « Dans le contexte qu'on connaît actuellement de tensions internationales, comment est-ce qu'on peut se prémunir des dérives de l'IA qui peuvent parfois faire peur à la population générale ? On l'a déjà vu, je pense, il y a quelques années avec les dérives que Facebook avait eues avec le Cambridge Analytica, etc. De la manipulation que peuvent avoir les réseaux sociaux sur les personnes de manière générale. »
Léo Bourrel : « Je pense malheureusement qu'avec l'IA, on va accélérer sur beaucoup de choses. Tout simplement parce qu'avant, on créait un clip de propagande, ça prenait un peu de temps. Aujourd'hui, ça va prendre quelques minutes ou quelques heures. Mais en tout cas, ça va beaucoup plus vite. On peut faire du volume, on peut faire des choses qui sont… on peut faire des trucages, on peut faire beaucoup de choses. Donc à mon avis, c'est un peu compliqué de… enfin, on se dirige vers quelque chose qui est quand même assez compliqué sur tout ce qu'on va voir sur Internet. Et je pense qu'une des grosses compétences pour les futures générations et même pour nous, ça va être le regard critique, être capable d'être très critique par rapport à ce qu'on voit sur Internet. Et encore qu'aujourd'hui, ça se limite à ce qu'on voit sur Internet, mais en fait, pourquoi pas être critique par rapport à ce qu'on voit demain dans la rue ? J'ai vu il n'y a pas longtemps une photo d'un magazine, je ne me souviens plus ce que c'était le magazine, mais sur lequel on voyait une personne qui brandissait justement une photo. Et sur la photo, on voyait, je crois que c'était un bébé qui pleurait, quelque chose comme ça. C'était une image un peu émouvante. Sauf qu'en fait, si la photo, donc la photo dans le magazine, si on dézoome, on voyait qu'en fait, elle avait six doigts. Pourquoi ? Parce qu'en fait, c'est une image qui était générée par l'IA, sauf que au niveau du magazine, ils ont juste vu une personne dans la rue qui brandissait une photo. Et du coup, la photo, elle n'avait pas été coupée, on ne voyait pas les doigts. Donc pour eux, ils ont fait un vrai travail journalistique, il n'y a rien à reprocher parce qu'ils ne pouvaient pas connaître évidemment que cette photo a été manipulée à la base par de l'IA. Et pourtant, ça crée un peu un précédent où du coup, un magazine diffuse une image qui est un petit peu truquée, qui est falsifiée, dans du grand public, dans quelque chose qu'on aurait pu tous voir dans la rue, chez notre marchand de journaux. Et ça, du coup, pour moi, ça amène un petit, je veux dire, un petit front, un risque qu'on va rencontrer un petit peu tous les jours. Et c'est pour ça que le sens critique va être hyper important. »
Julien Redelsperger : « Aujourd'hui, tu as même des arnaqueurs, des scammers qui tentent de décroquer des personnes peut-être plus âgées en utilisant des techniques d'IA qui sont parfois assez redoutables. »
Léo Bourrel : « Ouais, exactement. J'avais vu une vidéo, enfin un reportage là-dessus, où justement, avant du coup, ils ne parlaient que par message. Ensuite, ils sont mis à faire des vidéos et du coup, eux, ils avaient juste un outil qui transformait la voix et ils parlaient un peu en même temps que la vidéo. Et maintenant, en fait, il y a du… je ne sais pas si c'est encore le cas, mais en tout cas, je pense que c'est quelque chose qui va arriver à terme. Il y aura un peu un style de deep fake en live. Et à partir de ce moment-là, ces personnes-là, ils pourront dire "ben, appelle-moi si tu ne crois pas que je suis une vraie personne". Du coup, ils pourront faire ça par milliers. Et effectivement, pour nous, nos grands-parents, je pense qu'ils sont les premières victimes de ce type d'arnaque. Ils ne pourront pas s'imaginer que c'est possible d'avoir une fausse personne, on va dire, en direct, en live. »
Julien Redelsperger : « Ok, parfait. Ben écoute, merci beaucoup Léo. Alors à toi à présent, quelles questions est-ce que tu aimerais poser au prochain invité? »
Léo Bourrel : « Il me reste grand changement, on va dire, de l'IA. Tu vois, tout à l'heure, tu m'as demandé un peu, moi je t'ai parlé des agents d'IA, etc. Il y a un million de choses qui peuvent être réalisées en IA. Et du coup, je suis assez curieux de savoir, du coup, l'avis de cette personne sur quelle serait selon lui la prochaine grande révolution de l'IA. »
Julien Redelsperger : « D'accord, parfait. Ben écoute, c'est bien noté. Merci beaucoup de ta participation Léo Bourrel. Je rappelle que tu es Data Scientist et CEO d'IA Lab, une agence dédiée à l'accompagnement des entreprises en matière d'intelligence artificielle. Merci d'avoir participé à ce podcast. »
Léo Bourrel : « Merci à toi, merci beaucoup. »
Cette transcription a été réalisée par un outil d'intelligence artificielle. Elle n'est peut-être pas 100% fidèle au contenu d'origine et peut contenir des erreurs et approximations.