Jeux, IA et gamification : l'avenir de la formation
Jeux de plateau, jeux de rôles, escape games… avez-vous déjà pensé à la manière dont la gamification peut révolutionner la formation en entreprise ? Dans cet épisode, Julien Redelsperger accueille Benoît Sommerlad, expert en gamification et ingénierie pédagogique. Ensemble, ils explorent comment l'intelligence artificielle peut rendre les expériences de formation plus engageantes et impactantes. Vous découvrirez comment l'IA permet de personnaliser les contenus de formation en fonction des préférences des apprenants et des spécificités de l'entreprise. Benoît partage des exemples concrets de scénarios gamifiés, comme des escape games ou des jeux de plateau, qui transforment les sessions de formation traditionnelles en expériences immersives et dynamiques. Vous apprendrez également comment l'IA aide à la création de contenus plus rapidement, à tester de nouvelles idées et à automatiser des tâches répétitives, libérant ainsi du temps pour se concentrer sur l'innovation et la créativité. Ne manquez pas cette discussion enrichissante sur l'avenir de la formation par la gamification et l'IA, et comment ces innovations peuvent transformer votre approche de l'apprentissage en entreprise.
Expert en gamification et ingénierie pédagogique, Benoit Sommerlad accompagne les entreprises pour transformer leurs formations en apprentissages impactants et ludiques. Il met l'IA au service du jeu et des enjeux d'engagement des entreprises.
Benoit Sommerlad
Expert en gamification et en ingénierie pédagogique
Julien Redelsperger : « Et pour cela j'ai le plaisir d'être accompagné par Benoît Sommerlad qui est expert en gamification et en ingénierie pédagogique. Son rôle, pour faire simple, c'est de transformer les expériences de formation en apprentissage impactant et ludique. Et on va justement essayer de comprendre comment l'intelligence artificielle peut l'y aider. Aujourd'hui, nous allons donc parler de jeux, mais aussi de jeux de rôle, de jeux vidéo et d'expériences gamifiées. Bonjour Benoît, merci de m'accompagner pour cet épisode d'AI Experience. Comment vas-tu ? »
Benoît Sommerlad : « Bonjour Julien, très bien, merci. »
Julien Redelsperger : « Avant de débuter, Benoît, est-ce que tu peux bien sûr te présenter et expliquer brièvement un peu quel est ton métier et en quoi ça consiste ? »
Benoît Sommerlad : « J'ai cofondé une société qui s'appelle Booga il y a maintenant cinq ans. Donc c'est une agence de gamification. Nous, notre cœur de métier, c'est rendre ludique des choses qui ne le sont pas forcément, notamment pour les entreprises, des formations, des team building, des onboarding, du recrutement. On utilise donc des mécaniques ludiques pour rendre plus engageant, plus impactant ces temps d'entreprise, tant en physique qu'en digital. Et donc il y a pleinement son rôle maintenant et que chez Booga, moi je m'occupe de toute la création, donc la création des jeux, la création des mécaniques, sur la partie tech également, et puis tous les sujets liés à l'opérationnel pour faire en sorte que nos clients puissent vivre des expériences ludiques pour leur formation à les onboarding. »
Julien Redelsperger : « Donc concrètement, c'est-à-dire que si on prend le cas d'une formation, au lieu de passer une heure devant un PDF ou devant un cours en ligne par exemple, tu vas créer des interactions, des jeux, des quiz qui vont rendre l'expérience plus ludique, c'est ça ? »
Benoît Sommerlad : « Voilà, exactement. L'idée, c'est de faire de l'expérientiel. Je pense qu'on a tous subi des formations qui duraient 3 à 4 heures, présentation PowerPoint, au bout de 5 minutes tout le monde avait décroché et qu'à la fin tout le monde a perdu son temps, le formateur comme les formés. Nous l'idée c'est justement de réduire ce temps-là, de le rendre plus compact et de le rendre expérientiel, donc de créer des scénarios qui ne sont pas ancrés dans la réalité de l'entreprise, pour aussi faire sortir les gens de leur quotidien, donc qu'ils réfléchissent de manière différente et avec des mécaniques ludiques qui sont forcément liées au sujet de la formation. On parle de communication, on va les mettre dans des situations de communication à distance, de communication sous pression et ainsi de suite, et qu'après on va pouvoir débriefer et que naturellement on va pouvoir s'appuyer sur ces expériences ludiques, sur ce jeu pour avoir des messages qui sont beaucoup plus ancrés dans le réel que si tu es passif sur une formation, assis sur ta chaise à écouter des slides. »
Julien Redelsperger : « D'accord, et donc si on prend le cas par exemple du domaine de la formation en entreprise typiquement, comment est-ce que toi tu utilises l'intelligence artificielle pour créer justement des contenus qui donnent envie de s'impliquer, de s'intéresser, qui soient vraiment pertinents et aussi un peu ludiques ? C'est quoi le rôle de l'IA dans ce processus ? »
Benoît Sommerlad : « Donc il y a différentes manières d'utiliser l'IA sur ce domaine-là. L'une des premières manières c'est justement d'aller personnaliser l'expérience en fonction de l'entreprise mais aussi en fonction de l'apprenant. On a tous des manières différentes d'apprendre, on a tous des préférences d'apprentissage. Il y a des gens qui sont un peu plus visuels, il y a des gens qui sont un peu plus manuels, il y a des gens qui sont plus sur la logique, ainsi de suite. Donc on va pouvoir créer des expériences qui sont personnalisées pour s'adapter au niveau et aux préférences de chacun. Ça c'est la première partie. La deuxième partie c'est aussi s'adapter à l'entreprise, d'avoir des exemples, d'avoir des cas qui sont basés sur la réalité, sur l'historique, sur la stratégie, sur la vision de l'entreprise et avoir du contenu de formation qui est ultra personnel. Parce qu'à l'heure actuelle, tu vois des catalogues de formation où tout le monde va te proposer de la formation en Management et la formation sera la même que tu sois dans l'entreprise A, B ou C. Avec l'IA justement, on va pouvoir intégrer des données liées à l'entreprise pour justement personnaliser ce contenu-là. Et puis après, de manière très opérationnelle, l'IA peut te permettre de créer du contenu plus rapidement, d'aller tester du contenu, d'aller brainstormer, d'aller faire du contrôle qualité. Et toutes ces tâches-là qui au final te prennent pas mal de temps, qui ne sont pas forcément passionnantes mais qui sont absolument nécessaires, tu vas pouvoir les déléguer d'une certaine manière, les automatiser grâce à l'IA. Ça c'est les deux grands pans, on va dire, sur la partie création pure mais aussi sur la partie personnalisation des expériences. »
Julien Redelsperger : « D'accord. Est-ce que tu peux donner peut-être quelques exemples concrets de jeux ou d'expériences ludiques que tu as mis en place, que tu as mis en scène, pour qu'on puisse bien comprendre un peu à quoi ça ressemble exactement ? C'est un jeu de rôle ? C'est un espionnier ? C'est quoi ? »
Benoît Sommerlad : « Donc après, ça peut prendre différentes formes selon le contexte, selon le besoin. C'est vrai que les grandes catégories, ça va tourner autour d'escape games, donc on va mettre en place un scénario avec un enjeu fort, que ça soit un risque, que ça soit une catastrophe, et ainsi de suite. Devoir résoudre cette problématique-là via la cohésion dans l'équipe, via la communication, et ainsi de suite. Donc ça c'est vraiment une grande catégorie de jeux. Après, on a aussi des jeux de plateau thématiques. Je vais te donner un exemple qu'on a fait l'année dernière. Par exemple, pour un grand parc d'attraction français, il y avait cette problématique de former les saisonniers, la sécurité sur le parc. C'était une vraie problématique sur les précédentes saisons, qu'il y avait pas mal d'accidents du travail, et donc pour prévenir ces accidents du travail, vraiment mieux former les saisonniers. Donc ça c'était la première problématique. La deuxième problématique qu'on devait adresser, c'était de familiariser les saisonniers avec le parc, par exemple prévision de l'ouverture quelques semaines après, et pour qu'ils puissent se repérer, connaître le fait marquant du parc, de l'histoire, ainsi de suite. Donc on a créé tout un scénario autour d'un agent secret, une organisation qui voulait saboter justement l'ouverture du parc, et donc les saisonniers devaient parcourir le parc en équipe, résoudre des énigmes à chaque point d'intérêt, et sur chaque point d'intérêt, on leur diffusait du contenu de formation qu'ils devaient réutiliser pour résoudre les différentes énigmes, que ça soit de la manipulation, que ça soit de l'observation, et ainsi de suite. C'est vraiment créer des expériences qui sont diverses et qui ont pour fondement des messages que l'entreprise veut faire passer, mais de les rendre un peu plus fun, un peu plus engageants et un peu plus ludiques. »
Julien Redelsperger : « D'accord. Quand tu parles aux apprenants qui suivent ces formations, qu'est-ce qu'ils te disent à l'issue de ces expériences ludiques ? Est-ce que... Ok, c'est fun, c'est sûr, mais est-ce qu'ils ont appris des choses ? Est-ce qu'ils retiennent mieux les choses que sur une formation traditionnelle, en salle, avec un powerpoint ? »
Benoît Sommerlad : « Oui, ce qui est marrant, c'est que généralement, quand on commence à travailler avec une entreprise, la première chose qu'on nous dit, c'est surtout l'objectif, c'est d'apprendre et pas le fun. Ok. Et que le premier commentaire qu'on a toujours, c'est que si on avait su, on aurait demandé encore plus de fun. Parce qu'au final, les gens comprennent et les gens voient que les messages passent mieux, que l'ambiance dans le groupe est naturellement meilleure, qu'on gagne du temps aussi, qu'on peut faire passer du contenu qui généralement dure 3-4 heures, on peut le faire passer en une heure parce que les gens sont tout le temps en action. C'est des micro-modules dont l'attention est toujours stimulée. Parce que c'est ça aussi la problématique de la formation, c'est que quand tu es passif, ton temps d'attention est de 5, 10, 15 minutes maximum, et puis après tu décroches, et puis après tu vas remettre ton attention sur autre chose. Alors que là, si tu crées des expériences ludiques, si tu les stimules constamment sur différentes mécaniques, sur différents sujets, sur différentes modalités, et bien du coup, tu n'as pas le temps de décrocher, et donc du coup, ton apprentissage est accéléré. Les apprenants le ressentent, et ce qui est apprécié, c'est le fait de ne pas avoir l'impression d'apprendre. Et ce côté un peu régressif, parce que c'est vrai que la manière principale qu'on a d'apprendre quand on est enfant, c'est de jouer. On a des enfants, et qu'on le voit dans leur développement, ils passent leur temps à jouer. Et c'est comme ça qu'ils ont les premières notions d'apprentissage super complexes, de la géométrie, de se repérer dans l'espace, de la motricité, de la manipulation, de l'observation, et ainsi de suite. C'est que par le jeu, et c'est quelque chose qu'on met en opposition, après, quand on rentre dans la vie active, de "ah ben, il faut surtout travailler, et surtout pas jouer". Alors que les deux peuvent être complètement complémentaires, et que si on s'inspire justement des principes qu'on utilise quand on est enfant, et qu'on ne les lâche pas tout au long de notre vie, et bien je trouve que déjà, on y prend plus de plaisir, et que c'est l'une des modalités aussi à l'apprentissage, c'est la motivation, c'est le plaisir, et que si tu n'as pas de plaisir à apprendre, du coup ton apprentissage ne servira pas à grand chose, et que si tu recrées justement ce plaisir en faisant appel à des souvenirs, et à des petites madeleines de proust, on va dire, il y a forcément beaucoup plus d'impact. »
Julien Redelsperger : « J'utilise l'IA à différents moments du processus. Sur des phases de préparation, moi ça me permet justement de brainstormer, je m'en sers un peu comme un compagnon qui va justement me poser des questions, qui va me pousser dans mes retranchements, qui va justement appuyer sur les trous dans la raquette, et qui va me permettre d'avoir des réflexions qui sont un peu plus profondes, et que ça c'est intéressant parce que quand tu brainstormes avec des gens avec qui tu bosses tous les jours, et bien forcément les gens te connaissent, et qui te connaissent trop bien. Alors que là quand tu es avec l'IA, c'est beaucoup plus neutre, et que du coup les questions peuvent être des fois un peu plus percutantes, un peu plus directes qu'avec les gens avec qui tu bosses au quotidien. »
Benoît Sommerlad : « À chaque fois que je vais créer un scénario, à chaque fois que je vais créer un jeu, moi ma volonté c'est de m'ancrer au maximum dans le réel. C'est certes de créer des scénarios qui sont imaginaires, mais qui ont des ancrages réels, qui ont des références au réel, et que ça c'est un travail qui demande énormément de temps de recherche documentaire, et que avec l'IA c'est ça qui est fantastique, c'est qu'en quelques lignes, si tu en prends plutôt bien ficelé, tu vas pouvoir accéder à des ressources, accéder à des informations qui t'auraient pris une, deux, trois heures. Ça me permet aussi, de manière plus concrète, d'aller tester des jeux, parce qu'encore une fois, moi je le fais tester à nos équipes, à des partenaires et à des gens qu'on connaît bien, mais au bout d'un moment tu connais aussi un peu leur manière de réfléchir, leur manière de faire, et que je trouve que c'est bien des fois d'avoir ce côté complètement externe et complètement neutre d'une IA qui va te faire un test, c'est un point de vue supplémentaire. »
Julien Redelsperger : « Et en termes d'outils Benoît, est-ce que tu utilises Midjourney, ChatGPT, tu peux nous donner quelques exemples ou quelques idées d'usages peut-être concrets ? »
Benoît Sommerlad : « J'utilise ChatGPT, Cloud, je me suis mis sur Mistral récemment parce que je trouve que leurs modèles sont plutôt bien ficelés et que j'apprécie le fait qu'ils soient français, je pense que c'est un peu les seuls, et donc c'est un vrai enjeu pour nous, cet enjeu de souveraineté des outils qu'on utilise, et que c'est vrai que là-dessus Mistral coche toutes les cases. Après sur Midjourney, je l'ai utilisé à certains moments, je l'utilise de manière ponctuelle mais je l'utilise plus pour des moodboards. Je l'utilise en phase préparatoire pour des inspirations, pour des bases d'illustration. Je ne l'utilise jamais comme modèle fini parce que je trouve que les résultats ne sont pas toujours à la hauteur de ce que tu peux imaginer, de ce que tu peux vouloir, mais aussi pour des raisons purement éthiques liées au droit d'auteur et ainsi de suite. Je m'en sers comme travail préparatoire, comme source d'inspiration, pareil dans l'optique d'aller toujours plus vite et d'être toujours plus efficace. Après, je ne délègue pas l'intégralité du processus créatif et je pense qu'on en discutera un peu plus tard parce que je pense que ce processus créatif-là reste du fait de l'humain et que l'IA est un outil plus qu'une fin en soi dans nos métiers. »
Julien Redelsperger : « Alors ça fait plusieurs années que tu fais évidemment ce travail, est-ce que tu avais une différence en termes de temps et d'organisation avant l'IA et après l'IA ? Est-ce que tu es capable de mesurer combien de temps ça te fait gagner par exemple sur la mise en place d'un jeu, d'une formation ? »
Benoît Sommerlad : « Ça me fait gagner un tiers du temps. »
Julien Redelsperger : « C'est énorme. »
Benoît Sommerlad : « Donc ce qui est assez colossal et ce qui est plutôt plaisant même parce qu'en fait c'est du temps, comme je te l'ai expliqué tout à l'heure, c'est du temps qui est absolument nécessaire mais qui est rébarbatif. C'est du test, c'est du check, c'est de la recherche documentaire. Bref, ce n'est pas des tâches qui ont une grosse valeur ajoutée et que pour moi l'IA c'est ça justement l'intérêt principal, c'est de pouvoir déléguer toutes ces tâches à faible valeur ajoutée et pour que toi après tu puisses te concentrer et te dégager du temps pour aller plus t'inspirer, pour aller d'autant plus créatif, d'aller pousser tes concepts d'autant plus loin, ainsi de suite. Moi c'est du temps que je réinvestis, ce n'est pas forcément du temps que je me dégage pour aller faire autre chose et aller au cinéma, c'est du temps que je dégage pour améliorer encore plus nos produits, nos pratiques et d'aller me poser de nouvelles questions que des fois tu n'as pas le temps parce que tu es pris par les deadlines et par le quotidien. »
Julien Redelsperger : « Il faut combien de temps en moyenne pour créer un jeu, par exemple une formation gamifiée, je sais que ça varie selon le nombre de participants, le client, mais en gros tu es capable de nous donner quelques estimations ? On parle d'un travail de 3 heures, 3 semaines, c'est quoi l'idée ? »
Benoît Sommerlad : « Normalement on dit à nos clients pour avoir un produit fini, partir de zéro, vraiment de ne pas avoir de contenu de formation, de ne pas avoir d'idée de base, il nous faut 3 mois. 3 mois pour créer le contenu de formation avec nos clients, pour justement créer des scénarios, des mécaniques ludiques, des solutions techniques, que ce soit en présentiel, en virtuel, en hybride. 3 mois ça nous donne le temps confortable pour faire bien les choses. Après la réalité de la chose c'est que généralement les clients nous appellent 3 semaines avant l'événement et nous disent "voilà j'ai un besoin, est-ce que vous pouvez le faire ?" Et puis vu qu'on les aime bien, vu qu'on est toujours très aidé, et puis on fait un métier qui nous passionne, on dit généralement oui, et puis là ça fait des grosses journées on va dire. Mais oui, c'est des processus qui sont un peu longs, mais parce que c'est aussi des processus qui sont importants pour les entreprises. Une formation ça peut complètement bouleverser une entreprise dans le sens positif et dans le sens négatif. Si tu as une formation qui est mal faite, qui tape complètement à côté des besoins des équipes, et bien ça peut être catastrophique. Donc on aime bien aussi vraiment co-construire et impliquer nos clients à toutes les étapes de ce processus-là et aussi avoir le temps de s'imprégner de la culture d'entreprise, des documents, et que là-dessus l'IA nous aide aussi pour ce traitement des données, pour justement aller plus rapidement sur l'essence même de ce que veulent nos clients. »
Julien Redelsperger : « D'accord. J'ai une question sans doute un peu philosophique, mais est-ce que tu dirais que l'IA ça t'aide à développer ta créativité ou au contraire est-ce que tu pourrais dire que c'est un frein finalement, parce qu'elle t'enferme quelque part dans un carcan ? Comment est-ce que tu positionnes l'IA générative et les outils d'IA dans le processus créatif ? »
Benoît Sommerlad : « C'est une super question, parce qu'effectivement ça peut avoir cet effet pervers. C'est un effet que j'appelle l'effet dictionnaire, parce que quand j'étais plus jeune et que j'étais en cours d'anglais, je savais qu'à partir du moment où je ne connaissais pas un mot et que j'allais le chercher dans le dictionnaire, et bien dans les 5-10 minutes suivantes, j'allais tout le temps me référer au dictionnaire parce que j'oubliais l'intégralité des mots de mon vocabulaire d'anglais de mes jeunes années. Et que c'est vrai que si tu t'appuies trop sur l'IA, effectivement tu as ce risque de t'enfermer là-dedans et d'en devenir complètement dépendant, de vouloir lui déléguer la création de scénarios, de vouloir lui déléguer la création des mécaniques, et ainsi de suite. Je pense qu'après, si tu es conscient de ça et que du coup tu prends le recul nécessaire et que tu l'utilises comme un outil et pas comme une fin en soi, clairement pour moi, ça m'a boosté ma créativité, ça m'a ouvert de nouveaux horizons, ça m'a rendu d'autant plus curieux même sur un aspect technique. Moi qui n'ai pas du tout un background technique à la base, je viens du monde de la restauration donc absolument rien à voir avec l'IA, et bien je me suis penché sur les aspects techniques, sur comment est-ce qu'un modèle d'IA est construit, sur comment est-ce que tu peux aller coder en Python pour aller fine-tuner tes modèles, et ainsi de suite. Bref, c'est un sujet où je me suis découvert une appétence, un intérêt, une curiosité technique que je n'avais pas forcément soupçonné à la base, et que de fil en aiguille, ces sujets-là, ça peut aussi t'inspirer dans la création de jeux. Moi je sais que pour créer un jeu, je m'inspire du monde qui nous entoure. Donc que ça soit d'aller lire des bouquins de cuisine, ou d'aller voir une expo, ou d'aller voir une conférence sur la physique nucléaire, ou bref, ainsi de suite, des trucs qui n'ont rien à voir avec ton quotidien. Que l'IA est un sujet supplémentaire, et moi ça m'aide dans mon processus créatif de me dire "Ah bah tiens, ça marche comme ça, est-ce que ça, cette mécanique de pensée de l'IA, cette structuration de l'IA, je peux la traduire en jeu, et aussi je peux la traduire en formation, parce que c'est un vrai sujet aussi chez nos clients. Tout le monde parle d'IA, mais personne ne sait trop ce que c'est et comment ça marche. »
Julien Redelsperger : « Est-ce que tu pourrais faire une formation ludique, grâce à l'IA, pour acculturer les gens à l'IA ? »
Benoît Sommerlad : « Alors, scoop, oui, c'est dans les tuyaux, justement. Effectivement, non, non, c'est un vrai sujet, parce que comme je le disais, c'est que, il y a quelques années, tout le monde nous parlait de Metaverse, et tout le monde voulait faire des formations sur le Metaverse, parce que personne ne savait ce que ça voulait dire le Metaverse, et effectivement, ça ne voulait pas dire grand-chose ce mot-là, parce que tu y mettais absolument tout ce que tu voulais derrière, et que ça, ça a un peu disparu au profit de l'IA, qui est pour moi beaucoup plus concret, et qui va rester un bon zombie-tard, et que le fait de former les gens à "Qu'est-ce que c'est l'IA, comment ça fonctionne, comment tu peux l'utiliser, quels sont les points d'attention, quels sont les bénéfices, etc.", c'est essentiel pour comprendre le monde de demain. Ça devrait faire partie des fondamentaux, même dans les prochaines années, des programmes de formation, et même en université, et même sur les plus jeunes années. »
Julien Redelsperger : « Alors, on a beaucoup parlé des formations plutôt destinées à entreprises, voire au niveau universitaire, mais le jeu, ce n'est pas que ça, c'est aussi le jeu de plateau, c'est aussi les jeux de rôle, et là aussi, toi, je sais que tu es passionné par ces sujets-là, tu vois les choses évoluer grâce à l'intelligence artificielle. J'aimerais qu'on parle un peu des jeux de rôle. Alors, tout le monde n'est pas familier avec le sujet, juste très rapidement, en 30 secondes, rappelle-nous ce que c'est, quelles sont les mécaniques, et comment ça fonctionne. »
Benoît Sommerlad : « Un jeu de rôle, c'est une expérience, plusieurs personnes qui vont se réunir autour d'un maître du jeu, qui va poser un scénario, et chaque personne autour de la table va incarner un personnage fictif, qui va vivre cette aventure collective, qui va être narrée par le maître du jeu, donc du coup, c'est une expérience qui est collective et narrative autour d'un scénario, d'une thématique, généralement, soit futuriste, soit fantastique, soit médiévale, c'est les trois grandes thématiques du jeu de rôle. Parmi les plus connues, on peut citer Donjons & Dragons, par exemple, qui est vraiment la franchise culte des jeux de rôle, qu'on aperçoit à plusieurs reprises dans la série Stranger Things, notamment, si vous avez vu, ça vous donne un peu l'idée et l'atmosphère, et donc justement, dans ce jeu de rôle, quelle est la place de l'IA et comment est-ce que l'IA s'intègre dans cette dynamique ? Parce qu'a priori, un jeu de rôle, c'est juste plusieurs personnes autour d'une table, avec des choses très pratiques, un plateau, des personnages, des cartes, des dés, etc. Elle fait quoi l'IA là-dedans ? »
Benoît Sommerlad : « L'un des fondements du jeu de rôle, et ce qui va faire qu'un jeu de rôle est bon, c'est aussi l'immersion, c'est de vivre pleinement cette aventure, de faire corps avec ton personnage, de faire corps avec l'univers, de faire corps avec les différents chapitres, les différents rebondissements, et que là-dessus, l'IA va clairement améliorer l'expérience pour justement créer des scénarios encore plus immersifs lorsqu'on s'adapte en différentes personnes et aux facultés et à leurs préférences. Ça va aussi te permettre de créer plus rapidement des cartes, des univers, des descriptions de lieux, parce que le jeu de rôle se base aussi pas mal sur la description de "Ok, tu rentres dans un donjon, le donjon ressemble à ci, à ça, il y a des tours, des pièces, etc.", ce qui est un gros travail pour le maître du jeu, généralement, parce que c'est généralement le maître du jeu soit qui lit, soit qui écrit lui-même ses scénarios, et donc là-dessus, l'IA peut l'accompagner pour justement créer plus rapidement des contenus qui sont plus immersifs, qui sont plus engageants et qui sont plus adaptés à différentes personnes, et avoir aussi un niveau de difficulté qui va être beaucoup plus fin que si tu lis un bouquin ou tu lis un scénario classique de Donjons & Dragons qui est pour le public général. Si tu t'appuies sur l'IA, tu vas avoir encore une fois de la personnalisation et un degré de finesse qu'il ne pourrait pas avoir autrement. »
Julien Redelsperger : « Il y a un sujet important quand on parle d'IA, notamment d'IA générative, c'est la notion d'hallucination, je réexplique rapidement, c'est la capacité de l'IA à créer des faux événements, des faux personnages de manière très convaincante. Dans le cas du jeu de rôle, par exemple, finalement, le fait que l'IA hallucine, ça peut être quelque part un point positif, parce que ça peut t'emmener vers un univers ou créer des sujets différents. »
Benoît Sommerlad : « Et puis ça peut te créer des rebondissements que personne n'a vu venir, en fait. Donc clairement, c'est l'un des seuls bénéfices des hallucinations, on va dire. »
Julien Redelsperger : « Voilà exactement, on n'a plus aucune limite et que même les défauts de l'IA peuvent devenir des avantages parce que tu peux raconter des histoires qui peuvent vraiment partir dans tous les sens et créer des univers et t'ouvrir de nouvelles portes. Tu vas pouvoir interagir avec, après tu vas pouvoir continuer dans cette hallucination ou continuer sur cette piste là ou sinon lui dire "bah non, c'est pas comme ça et remets moi sur les rails de l'histoire principale". »
Benoît Sommerlad : « Il faut toujours garder en tête aussi que l'IA va répondre à des demandes. Donc c'est comme une conversation, si l'IA commence à faire n'importe quoi, c'est aussi comme dans une conversation avec une personne physique. Tu vas pouvoir le recadrer, le remettre sur le chemin que tu veux. »
Julien Redelsperger : « Ça veut dire que sur un jeu de rôle classique finalement, est-ce qu'un ordinateur avec la GPT peut remplacer le maître du jeu ou les deux travaillent ensemble ? »
Benoît Sommerlad : « Il y a déjà pas mal de GPTs, les bots que tu as sur le store d'OpenAI qui sont dédiés aux jeux de rôle. Après c'est bien dans certaines situations notamment parce que question logistique, faire un jeu de rôle ça demande de se voir régulièrement en physique et selon les emplois du temps des uns et des autres, des fois ça peut être un peu lourd. Donc tu peux aussi vivre cette expérience un peu en solo via les maîtres du jeu contrôlés par l'IA. Ça peut aussi être en support de faire des scénarios à deux voix, c'est-à-dire que tu as un maître du jeu en physique et un maître du jeu IA et donc ils vont pouvoir se répondre et interpréter deux personnages dans le scénario. Donc du coup ça crée des expériences de jeu qui sont beaucoup plus poussées et beaucoup plus faciles à mettre en place et que pour moi ça participe aussi à la démocratisation de ce genre de pratique. »
Julien Redelsperger : « Donc quand on crée des expériences ludiques, c'est pas un job qui est vraiment solitaire puisqu'on travaille avec différents métiers, différentes spécificités, c'est le cas notamment avec des rédacteurs, des traducteurs, des illustrateurs, des spécialistes en pédagogie. Est-ce que ça veut dire que ces métiers-là sont potentiellement mis en danger à cause de l'intelligence artificielle et si on pousse vraiment la démarche un peu plus loin, est-ce que l'IA pourrait un jour te remplacer en tant qu'expert en ingénierie pédagogique ludifiée ? »
Benoît Sommerlad : « Je pense pas. C'est vrai que c'est un grand débat dans la société en règle générale et aussi dans le monde ludique. D'abord parce qu'on l'a vu avec l'utilisation de Mid Journey, n'importe qui maintenant peut faire des illustrations pour un jeu de société ou pour un jeu vidéo de suite. Après je pense que c'est comme tous les nouveaux outils. Il y a quelques années, il y a les comptables qui avaient peur d'Excel et qui pensaient que leur métier allait disparaître. Au final, il y a toujours des comptables, mais c'est juste que leur métier s'est un peu transformé et qu'ils font des analyses beaucoup plus poussées, et ainsi de suite. Je pense que vraiment l'IA va jouer ce rôle-là. Ça va nous forcer et ça va nous pousser aussi à avoir une vraie valeur ajoutée. Ça va nous permettre d'automatiser, de déléguer des tâches qui n'ont pas grand intérêt pour nous et de nous concentrer sur ce qui fait vraiment notre valeur. Après, il y a des problématiques aussi de droit d'auteur, de sécurité, de sécurité des données, ainsi de suite. Il va falloir cadrer, encadrer les choses, les giférer. Mais quand tu t'attaches au fondement de nos métiers, je pense que tout le processus créatif, c'est un processus que l'IA ne peut pas remplacer. Parce que certes, l'IA a emmagasiné beaucoup de données sur tout ce qui s'est fait, sur les scénarios, toutes les mécaniques, ainsi de suite, ainsi de suite, qu'elle va pouvoir processer et pouvoir te ressortir des trucs sur base de ce qui a déjà été fait, mais pas forcément sur la base de ce qui n'a pas été fait, et justement de la créativité et de l'essence même de nos métiers. Et puis après, si tu parles des illustrateurs, parce qu'un illustrateur, certes, tu peux demander à une IA de te faire une illustration dans le style de Picasso, dans le style de Gauguin, ainsi de suite. Après, ça ne sera jamais un vrai Picasso ou un vrai Gauguin parce qu'il n'y aura pas cette touche, ce supplément d'âme, et je crois vraiment que c'est ça le cœur de nos métiers, c'est ce supplément d'âme qu'on insuffle. Cette relation aussi qu'on a avec les joueurs, cette relation qu'on a avec nos clients, ainsi de suite. Une IA va processer de manière très mécanique, très neutre. Je ne pense vraiment pas que nos métiers soient en danger. Si on intègre l'IA comme un outil et si on l'utilise de manière raisonnable et raisonnée. »
Julien Redelsperger : « D'accord, parfait. Alors, on a parlé des expériences ludiques, formation, business, entreprise, on a parlé des jeux de rôle. J'aimerais juste qu'on termine notre conversation avec les escape games. On sait que c'est un sujet important, que ça s'est beaucoup démocratisé ces dernières années. On en voit quasiment dans toutes les villes. Quels sont, selon toi, les ingrédients d'un bon escape game et quel pourrait être le rôle de l'IA dans la mise en place d'un tel jeu ? »
Benoît Sommerlad : « Pour moi, un bon escape game, tu as deux ingrédients principaux. C'est l'immersion, d'avoir un scénario, mais aussi un environnement qui va vraiment te plonger dans une ambiance et qui va te forcer à croire à l'histoire qu'on t'a racontée. Et le deuxième élément, c'est la variété. Parce que c'est vrai que si tu as déjà fait quelques escape games, tu as des escape games où en fait, tu n'as que des cadenas ou que des codes. Et au final, tu vas prendre du plaisir sur les deux premiers et puis après, ça va être un peu un calvaire de finir parce que c'est répétitif, c'est poussif ainsi. Et qu'au plus tu vas avoir des mécaniques qui sont innovantes, des mécaniques qui sont différentes à chaque étape, au plus tu vas faire "Ah ouais, ça c'est malin". Et que j'aime bien, parce que j'en fais pas mal et puis c'est aussi une partie de mon métier de créer des escape games. J'aime bien l'effet "Waouh" et l'effet "Ah ça, j'ai jamais vu ou ça, j'y avais pas pensé". Et que c'est un bon détournement d'un objet, c'est un bon détournement d'une pratique. Et que là-dessus, l'IA peut vraiment apporter à ces deux aspects-là. Sur l'immersion, on en a parlé, mais vraiment d'aller pousser l'immersion beaucoup plus loin, d'aller s'adapter aux joueurs, d'aller en faire une expérience beaucoup plus personnelle. Donc aussi, quand tu vas dans un escape game, c'est toujours le même scénario, quel que soit le joueur, quel que soit le groupe de joueurs, quel que soit le moment de l'année. Si tu intègres de l'IA, tu vas vraiment pouvoir avoir une expérience qui va être personnalisée, qui va pouvoir être personnelle. Et donc, d'embarquer vraiment les joueurs et de les faire se sentir encore plus spéciaux. Et qu'à partir du moment où tu te sens spécial, tu vas encore plus être dedans. Et aussi sur la variété des mécaniques, ça va te permettre, comme je te disais, c'est que l'un des fondements de l'escape game, c'est d'aller détourner des objets du quotidien pour leur donner des nouvelles utilités, pour avoir un côté malin. Et que là-dessus, il y a vu les quantités de données que tu as sur les modèles d'entraînement, toutes les utilisations détournées de n'importe quel objet peuvent être répertoriées. Et que des fois, ça peut, vous le savez que moi, ça m'est arrivé de lui poser la question sur un objet du quotidien de comment est-ce que tu peux l'utiliser de manière différente et que de manière volontaire ou de manière involontaire via des hallucinations, ça te donne des fois des idées en disant "ah ouais, mais en fait, c'est pas bête, je vais pouvoir faire ça ou faire ça pour justement servir mon propos et mon scénario". »
Julien Redelsperger : « Et donc toi, quand tu crées des escape games, on est d'accord que tu es sur la partie créative, mise en place, etc. Tu ne vas pas construire le décor, tu travailles avec des professionnels pour ça ? »
Benoît Sommerlad : « Ça m'arrive sur des plus petites mises en place, sur des escape box, ça m'arrive de créer aussi les différents objets, les différents outils, les différents visuels, etc. Mais après, oui, sur des dispositifs beaucoup plus gros où là, tu as de la construction, bien évidemment, on a des partenaires qui s'en occupent. »
Julien Redelsperger : « D'accord. Pour conclure, peut-être ton escape game préféré ou ton environnement, ton décor préféré pour un escape game, ça serait quoi ? »
Benoît Sommerlad : « Alors, j'aime bien les escape games historiques. J'aime bien ne pas savoir différencier le vrai du faux et d'avoir un truc relativement plausible pour que tu aies un doute. Et donc, j'aime bien les escape games historiques qui se passent au Moyen-Âge, Renaissance, que ça se base sur la culture, sur les objets, etc. Et là, justement, tu as GPT, tu peux faire comme si tu dialoguais avec Richelieu, Louis XIV. J'ai créé justement des agents conversationnels qui vont prendre la place de personnages historiques ou de personnages fictifs, mais dans un environnement historique et qui vont soit te donner des indices, soit t'accompagner tout au long de ton histoire, etc. Et ça, c'est maintenant beaucoup plus facile de le faire, notamment via les GPT. Après, si tu veux pousser beaucoup plus ce truc, il faut coder un peu, il faut aller fine-tuner un peu tes modèles, mais c'est beaucoup plus abordable maintenant que ça ne l'a été il y a quelques années et que maintenant le grand public, avec un peu de temps, peut le faire chez lui. »
Julien Redelsperger : « Est-ce que ça veut dire qu'en gros, n'importe qui peut faire ton job ? »
Benoît Sommerlad : « Alors, oui et non. Non, mais de manière sérieuse, oui, fondamentalement, si tu es passionné par un sujet, je crois fondamentalement que n'importe qui peut faire n'importe quel type de travail à partir du moment où tu mets du temps, de la ressource et surtout de la passion. Après, c'est aussi de l'expérience. C'est-à-dire que quand j'ai commencé et que quand je revois maintenant les jeux que j'ai créés au tout début, tu en as toujours un peu honte parce que tu te dis, "Ah ouais, en fait, c'est bon, il a passé des heures et des jours et des nuits sur un truc qui est un peu pété." Alors qu'avec l'expérience, maintenant, tu vas beaucoup plus vite, tu vas beaucoup plus loin, tu as un rendu final qui est beaucoup plus quali, et ainsi de suite. Et à partir de là, oui, clairement, l'IA va pouvoir accélérer le processus de formation. Après, rien ne remplace l'expérience et surtout rien ne remplace les grosses galères que tu as quand tu crées des jeux ou quand tu crées des formations et quand tu te prends des murs et des murs et des murs et que tu passes des nuits et des nuits complètes. Ouais, ça, l'IA ne pourra jamais le faire parce que c'est un rapport humain, parce que c'est aussi un rapport à l'échec qui n'a pas lieu dans le monde de l'IA. Pour le coup, c'est ultra formateur de se dire "j'ai essayé un truc, je pensais que c'était génial, ça s'est planté, j'ai essayé de comprendre pourquoi et de faire en sorte que ça ne se reproduise pas." »
Julien Redelsperger : « Est-ce que tu as peut-être pour toute fin un fail à nous partager ? Un truc épique où tu t'es dit "ça va cartonner" et en fait ça s'est planté ? »
Benoît Sommerlad : « J'en ai eu pas mal, mais je vais t'en partager deux. On a eu il y a deux ou trois ans de ça un événement pour 200 personnes sur un escape game historique dans un super lieu parisien vraiment ultra premium. Donc grosse pression parce que de par le lieu, de par le nombre de personnes, c'était la première fois qu'on faisait autant de personnes et pour nous aider justement sur l'animation, on avait développé une application qui devait faire le maître du jeu, le maître du temps, et ainsi de suite. On avait délégué ça lorsque mes délais étaient courts et que du coup, le matin de l'événement, ça faisait quinze jours que notre développeur ne nous répondait plus et qu'il nous a envoyé la version test de l'application le matin de l'événement. Autant dire que ce n'était pas possible. Comment est-ce que tu vas expliquer à un client qui a dépensé quelques dizaines de milliers d'euros pour avoir une application qu'au final, tu vas avoir du papier et un crayon ? Ça a été formateur aussi et puis gros coup de bol, la directrice générale de cette boîte-là voulait absolument avoir du papier et du crayon et pas des applications. Donc on était plutôt bien tombé. »
Benoît Sommerlad : « Deuxième fail, c'était un jeu sur lequel j'avais passé beaucoup de temps et aussi de crafting et de conception visuelle. On arrive le jour de l'événement et ça devait être en intérieur, ça s'est finalement fait en extérieur. Au milieu du jeu, il y a eu un gros orage. Tout le matos a pris l'eau et sur ces deux exemples-là, l'enseignement principal, c'est d'avoir des plans B toujours. De se dire, là ça a pris l'eau, là tu n'as pas le matos que tu veux, qu'est-ce que tu fais, comment est-ce que tu réagis et comment est-ce que tu vas quand même créer une expérience qui est immersive, comment créer une expérience qui est différenciante et engageante et que ça encore, l'IA ne va pas pouvoir le faire parce que c'est de la réactivité, de la connaissance client, de ton métier. Dans les deux cas, ça s'est bien terminé et les clients étaient super contents. C'est resté des clients et maintenant on en rigole, même si tout le monde a un peu transpiré. L'IA pour nous, c'est un outil, mais ça ne remplacera pas l'humain de nos métiers et l'essence même de la formation et de la création du jeu. »
Julien Redelsperger : « Parfait, ça sera le mot de la fin. Alors Benoît, à la fin de chaque épisode, l'invité du jour doit répondre à une question posée par l'invité précédent. En attendant d'écouter la tienne, je te laisse écouter celle de Paul-Alexandre Réaud, qui est CTO et expert IA chez Virteem, une entreprise niçoise spécialisée dans l'IA et dans la réalité virtuelle. On écoute sa question. »
Paul-Alexandre Réaud : « Moi, je vois très bien les impacts que peut avoir l'IA sur la partie business. Maintenant, j'aimerais savoir comment est-ce que vous pensez que l'IA va influencer notre compréhension de la créativité et de l'originalité et à quel point une machine pourra un jour être véritablement créative et produire, pourquoi pas, de l'art, en tout cas ce qu'on perçoit comme de l'art aujourd'hui. »
Julien Redelsperger : « Alors c'est finalement très proche et le hasard fait bien des choses. Effectivement. On en a parlé et c'est effectivement très proche de ton domaine. Est-ce que tu as un avis sur le sujet ? »
Benoît Sommerlad : « Je pense que l'IA peut avoir une forme de créativité et qu'il faut qu'elle soit reconnue en tant que telle et que ce soit un domaine à entière. La créativité, ce n'est pas uniquement juste des données ingérées et des données produites. C'est beaucoup plus fin que ça et que pour moi, d'un côté, ça va aussi permettre de faire le tri sur le marché de la création entre des pseudo-créateurs, parce que tout le monde peut se prétendre créatif et tout le monde peut se prétendre graphiste, dessinateur, musicien, etc. parce qu'on a maintenant des outils qui nous permettent de faire des choses très rapidement et que pour moi, l'IA va justement permettre de donner accès à un maximum de personnes à des outils de ce type-là et de faciliter la création. Après, pour les véritables créateurs, le sujet est autre et pour moi, leur valeur ajoutée est plus humaine que technique. »
Julien Redelsperger : « Donc si je t'entends bien, l'IA est plutôt en mode assistant, copilote, compagnon créatif plutôt qu'une forme de soi. Ce n'est pas parce qu'on utilise un outil créatif d'IA qu'on est forcément quelqu'un de créatif derrière. »
Benoît Sommerlad : « Exactement. »
Julien Redelsperger : « D'accord, parfait. Très bien. Écoute, c'est clair. Alors à toi à présent, Benoît, quelle question est-ce que tu aimerais poser au prochain invité ? »
Benoît Sommerlad : « Dans le contexte qu'on connaît actuellement de tensions internationales, comment est-ce qu'on peut se prémunir des dérives de l'IA qui peuvent parfois faire peur à la population générale ? »
Julien Redelsperger : « D'accord, parfait. Très bien. Écoute, c'est noté. Je poserai la question. Merci beaucoup de ta participation. Benoît, je rappelle que tu es expert en gamification et en ingénierie pédagogique. Merci d'avoir participé à ce podcast. »
Benoît Sommerlad : « Merci, Julien. »
Cette transcription a été réalisée par un outil d'intelligence artificielle. Elle n'est peut être pas 100% fidèle au contenu d'origine et peut contenir des erreurs et approximations.