Entrepreneuriat et IA : comment les technopoles accompagnent les startups
L’intelligence artificielle impacte les projets de création d’entreprise et influence les projets de création d’entreprise. Pour en savoir plus, direction la Technopole de l’Aube en Champagne dans cet épisode d'AI Experience, où j’accueille Michaël Noblot, directeur délégué, pour explorer comment ces écosystèmes d'innovation deviennent des catalyseurs de succès pour les startups qui se lance dans l’IA. Découvrez comment la symbiose entre technopoles, enseignement supérieur et recherche dynamise l'innovation et crée des ponts pour développer des projets à base d’intelligence artificielle. Plongez avec nous dans une discussion éclairante sur les défis, les opportunités et les témoignages concrets d'entreprises qui évoluent grâce à un accompagnement personnalisé. Un épisode indispensable pour les entrepreneurs actuels ou en devenir qui veulent faire accélérer leur projet.
Aubois d’origine, Michaël Noblot est impliqué depuis de nombreuses années dans le développement et le rayonnement de son territoire en tant que Directeur Général Adjoint des Ressources et de la Transition à Y SCHOOLS. Tout en poursuivant ses missions dans ce groupe de formation et d’enseignement supérieur, il est revenu à ses premiers amours, à savoir l’entrepreneuriat et l’innovation, puisqu’il est également Directeur Délégué de la Technopole de l’Aube en Champagne depuis mars 2023. Responsabilité sociétale et développement durable font partie de ses engagements.
Michaël Noblot
Directeur Délégué
Julien Redelsperger : « Et pour cet épisode, j'ai le plaisir d'être accompagné par Michaël Noblot, qui est le directeur délégué de la Technopole de l'Aube en Champagne. Merci de participer à cet épisode d'AI Experience. Aujourd'hui, nous allons parler innovation, entrepreneuriat et accompagnement à la création d'entreprise. Comment vas-tu ? »
Michaël Noblot : « Très bien Julien, bonjour à toi, et je suis très heureux d'être avec toi pour ce podcast. »
Julien Redelsperger : « Écoute, je suis ravi de t'accueillir sur ce podcast. Alors juste avant d'aller plus loin, est-ce que tu peux nous indiquer et nous expliquer ce qu'est une technopole et quel est son rôle exactement dans le processus de création d'entreprises et d'entrepreneuriat ? »
Michaël Noblot : « Alors une technopole a plusieurs missions, en fait elle a à la fois un rôle d'animation et de mise en réseau de compétences au niveau à la fois d'enseignement supérieur, de laboratoire, de recherche, mais également en lien avec des industriels, parce que l'objectif c'est de créer de la valeur économique. C'est également une mission d'ingénierie, d'innovation et d'incubation, c'est-à-dire d'accompagnement de startups, j'y reviendrai tout à l'heure. Et puis c'est un outil d'un territoire, donc c'est aussi un rôle d'attractivité territoriale sur un territoire, donc faire du marketing territorial pour accueillir de nouvelles entreprises et de nouveaux projets type startups sur un territoire donné. Concrètement, nous au sein de la technopole de l'Aube, c'est à la fois un outil d'attractivité, c'est-à-dire faire venir des projets, une fois que ces projets sont là, c'est les accompagner, donc on a à la fois un incubateur de startups, on a aussi un incubateur étudiant transversal, ce qui est une vraie particularité, c'est-à-dire qu'on est l'incubateur de l'ensemble de l'enseignement supérieur de notre territoire. Ça c'est une vraie particularité, une vraie valeur ajoutée. On a également un programme complet d'accélération et d'accompagnement de startups, ça permet aussi à une startup de se développer. Et puis tout ça autour d'un réseau d'experts et de professionnels, de dirigeants d'entreprises, plus de 400 personnes à nos côtés qui sont totalement bénévoles et impliquées sur notre territoire, en lien bien sûr avec les laboratoires d'enseignement supérieur. Et cerise sur le gâteau, on a également une offre immobilière complète qui va jusqu'à un total de 12 000 m2 qu'on met à disposition d'entreprises. Donc notre métier, c'est de faire venir des projets et de faire qu'ils se développent sur notre territoire et qu'ils grandissent fortement. »
Julien Redelsperger : « D'accord, donc aujourd'hui on parle de la technopole de l'Aube en Champagne, département de l'Aube, situé à côté de Troyes, à une heure et demie de Paris. Mais des technopoles, il y en a partout en France, n'est-ce pas ? Chaque territoire a sa technopole ? »
Michaël Noblot : « Il y en a partout en France. Il y a un réseau national des technopoles qui s'appelle RETIS, donc il y en a sur tous les territoires, on va dire, dans toutes les régions, c'est sûr. Plus ou moins tous les départements ou métropoles, ça dépend des cas. Mais c'est aussi un réseau mondial avec l'IASP, donc il y a aussi des technopoles partout dans le monde. Et c'est vraiment l'objectif, c'est le lien entre l'innovation, l'enseignement supérieur, les laboratoires de recherche et l'économie. Et tout ça, l'objectif, c'est de favoriser la création de valeur par le biais de l'innovation qui vient souvent des laboratoires de recherche, mais également des laboratoires privés, et créer de la valeur. C'est vraiment l'objectif fondamental, c'est celui-ci. Et nous, au sein de notre technopole de l'Aube en Champagne, c'est vraiment d'installer des startups, les faire grandir, les faire accélérer, les accompagner dans leur développement, dans leur levée de fonds, dans leurs ressources humaines, et en lien, bien sûr, avec les préoccupations technologiques actuelles. »
Julien Redelsperger : « D'accord. Alors toi, ton rôle, je le disais en introduction, tu es directeur délégué de cette technopole de l'Aube. Quelles sont tes missions ? Qu'est-ce que tu fais au quotidien ? »
Michaël Noblot : « Alors au quotidien, ma mission, elle est, comme tout directeur, c'est de travailler sur des réflexions stratégiques, c'est-à-dire comment je positionne mon outil, qui est mon entreprise, qui est la technopole de l'Aube, en termes de développement économique et en termes d'attractivité. Parce que ma mission, ce que je disais, c'est de faire venir des startups et les aider à grandir. Donc comment je me positionne pour être toujours attractif, accompagner des projets de qualité, et puis surtout, comment je sens également, j'anticipe les tendances technologiques émergentes, comme l'IA, on va en parler tout à l'heure, mais également d’autres tendances technologiques. Et l'objectif, c'est aussi d'être attractif par rapport à ces tendances technologiques qui arrivent. Donc le plus tôt possible pour se positionner. Et puis, comme moi, je vends des services, mais il y en a qui vendent des produits, c'est être en phase avec son marché et anticiper les besoins. Et mon rôle, c'est bien sûr d'animer une équipe qui est là pour accompagner ces projets et ces entreprises, à les faire grandir. Donc la qualité, c'est des qualités de management également, et de recrutement de compétences et d'animer des équipes. »
Julien Redelsperger : « D'accord. Alors comme tu disais, on va évidemment parler d'intelligence artificielle. Toi qui es au contact vraiment un peu quotidien, direct avec des entrepreneurs, comment est-ce que tu perçois l'impact de l'IA sur le monde entrepreneurial actuellement ? Et est-ce qu'il y a plus de projets dont tu as connaissance qui ont une composante IA ? »
Michaël Noblot : « Alors aujourd'hui, clairement, l'IA dans les projets… alors il y a deux types de projets. Il y a ceux qui étaient déjà là il y a quelques années, qui sont toujours là du coup, qui eux, intègrent de plus en plus une démarche intelligence artificielle dans leurs projets, c'est-à-dire qu'ils développent des composantes, des briques, où ils utilisent l'IA au bénéfice de leurs projets, de leurs entreprises et de leurs produits ou services qu'ils vendent. Donc ça, ça se développe très, très fortement par des logiques d'optimisation, d'augmentation de la performance, dans la rationalisation, donc ça c'est vraiment un vrai développement. Et l'autre chose, c'est pour les projets qu'on accueille, de plus en plus de projets aujourd'hui, j'en donnerai des exemples tout à l'heure peut-être, il y a clairement de plus en plus de projets en lien avec l'IA qui intègrent, qui viennent en fait frapper la porte, qui ont besoin d'accompagnement. Et ça, c'est vraiment quelque chose d'essentiel aujourd'hui. »
Julien Redelsperger : « Et est-ce que vous, ça change un peu la manière de travailler ? Est-ce que le fait de travailler avec des startups orientées à l'IA, c'est différent de travailler avec des startups orientées, je ne sais pas, développement durable, industrie, médecine, etc. ? »
Michaël Noblot : « Alors la méthode globalement reste la même. La différence, c'est que pour l'IA en particulier, on a vraiment un réel enjeu de trouver des modèles économiques qui fonctionnent, puisque l'IA, quand les entreprises viennent, faisant bien sûr une création de valeur, l'objectif c'est de monétiser, on est dans des entreprises, et parfois pour certains projets, il n'est pas évident de monétiser puisque leurs clients éventuels se disent, c'est disponible, donc comment est-ce que, enfin ce lien, souvent on a l'impression que ça peut être gratuit. Et c'est arrivé à trouver un modèle économique, et c'est là-dessus souvent qu'il y a un gros point de travail avec les entrepreneurs qui ont ce type de projet, c'est trouver un modèle viable, et ensuite, un modèle économique viable, et ensuite c'est aussi, l'autre particularité, c'est les compétences. C'est-à-dire quand l'entreprise va se créer, elle a besoin de s'entourer, le dirigeant a besoin de s'entourer, l'entreprise a besoin de grandir, a souvent des compétences particulières, et souvent les compétences sont rares aujourd'hui sur l'intelligence artificielle, même s'il y a des écoles qui forment, qui se développent, mais elles sont rares et chères, et du coup c'est vraiment les deux points saillants, c'est comment je monétise, et après, arriver à recruter les bonnes compétences par rapport à ces problématiques. »
Julien Redelsperger : « D'accord. Si moi demain j'ai un projet de start-up à base d'IA, je viens frapper à la porte de la Technopole de l'Aube, est-ce que tu m’ouvres grand les portes ? Est-ce que tu filtres les projets ? Et si oui, sur quels critères ? »
Michaël Noblot : « Alors nous, on filtre dans tous les cas toujours les projets, sur une base qui est l'innovation, c'est est-ce que le projet est innovant ou pas, et ce n'est pas parce qu'on utilise de l'IA qu'on est forcément innovant dans ce qu'on propose en termes de services ou de produits. Bien sûr, c'est ce degré d'innovation. Nous, on a un accompagnement qui fait les premiers filtres qui permet de nous dire est-ce que le projet peut intégrer ou pas la Technopole, donc on a différents filtres, ce n'est pas le détail ici qu'on va donner, mais en tout cas, en effet, il y a quelques filtres internes et externes aussi, on fait appel à des réseaux d'experts, ce que j'évoquais tout à l'heure, on a 400 bénévoles à nos côtés qui permettent d'avoir un œil toujours qualitatif sur les projets qu'on accompagne et avoir un œil supplémentaire, enfin des yeux supplémentaires, c'est plusieurs paires d’yeux qu'on met autour de la table pour nous donner leur avis et voir si le projet est à la fois innovant et à la fois les points de vigilance par rapport à ces projets, parce qu'il y a toujours des points de vigilance, il n'y a jamais de projet idéal en général quand on est au stade de l'idée ou du projet qui va démarrer, et notre objectif clairement c'est de faire ce filtre-là, comme on fait pour tout projet, et ensuite on décide ou pas de l'incuber, et une fois qu'il est incubé, on l'accompagne pour l'accélérer, pour qu'il se développe et pour qu'il trouve son modèle économique, et éventuellement remettre en cause le dirigeant, si on voit que le modèle économique, quand on fait une preuve de concept qui ne fonctionne pas, soit on fait pivoter le projet, soit le dirigeant peut décider aussi…
Julien Redelsperger : « J'imagine que ce sont des décisions collégiales, ce n'est pas toi qui prends la décision tout seul, tu es entouré. »
Michaël Noblot : « Nous on prend une décision, à un moment donné, d'accompagner le projet lorsqu'il frappe à notre porte, c'est l'image que tu donnais tout à l'heure, mais ensuite on fait appel à des professionnels, à un moment donné, une fois qu'on a accompagné le projet, qu'on pense qu'il est mûr, qu'il a commencé à réfléchir sur son offre de valeur, sur son marché, sur sa stratégie, sur ses besoins financiers ou de développement, à ce moment-là, on fait appel à des experts de tout domaine, des domaines de l'entreprise, que ce soit des dirigeants d'entreprise, des avocats, des professions libérales, des financiers ou des financeurs potentiels, des professionnels DRH également et autres. Et là, on fait pitcher le projet, et là, c'est un échange questions-réponses pour voir quels sont les points de vigilance, les points forts bien sûr, et les points de vigilance, et après c'est à ce moment-là où on décide ou pas d'accompagner le projet via une commission tierce de la Technopole composée de dirigeants et de collectivités territoriales aussi, qui permettent de donner le go d'accompagnement derrière. »
Julien Redelsperger : « D'accord, parfait. Alors dans tes observations récentes, Michael, quels sont les secteurs qui te semblent les plus prometteurs en matière d'application de l'intelligence artificielle ? Est-ce que tu vois un peu des tendances ? »
Michaël Noblot : « Alors aujourd'hui, les tendances que l'on voit à nous par rapport aux projets qu'on accompagnent ou que l'on va accompagner, on a clairement le domaine de la santé, qui est un domaine qui se développe très très fort sur l'IA, à la fois dans l'imagerie médicale, parce qu'il y a un vrai enjeu sur l'imagerie médicale, mais également dans tout ce qui est lié à la périphérie de la santé, notamment à l'optimisation des flux, de la gestion du patient, comment… on donnera des exemples de projets qui ne sont pas accompagnés chez nous aujourd'hui ou tout à l'heure, mais clairement on a vraiment une vraie tendance sur la santé, qui est un domaine très très prometteur dans le domaine, et qui a déjà aujourd'hui des projets qui fonctionnent dans le domaine et qui fonctionnent très très bien. Après, dans la même logique, il y a le transport et la logistique, il y a un gros travail sur l'optimisation des flux, et notamment qui est en lien avec mon deuxième point, c'est sur comment est-ce qu'on optimise les chaînes et la supply chain pour être éventuellement plus frugal en termes de ressources, en termes d'énergie. Et puis le troisième point, c'est en lien, c'est l'énergie et l'environnement et la green tech, c'est-à-dire comment l'IA va permettre d'optimiser toutes les ressources, qu'elles soient énergétiques, en eau, en combustible, en carbone et autres, comment on peut tout optimiser pour limiter notre impact en termes négatifs sur l'environnement. »
Julien Redelsperger : « D'accord, donc juste pour reprendre, médecine, logistique, supply chain et green tech, développement durable, c'est un peu les trois grands domaines, c'est ça ?
Michaël Noblot : « On comprend que la green tech est plus émergente, c'est plus nouveau, mais on sent la tendance qui va arriver sur l'énergie et l'environnement, qui est une vraie tension globale, pas simplement sur un morceau de la planète, mais sur l'ensemble. On voit vraiment des projets qui pointent dans ces trois domaines. Beaucoup plus aujourd'hui en termes de maturité sur la santé de transport et la logistique et la supply chain au sens large, l'énergie et l'environnement, ça arrive… On a par exemple une entreprise qui fête ses 10 ans, donc qui a quand même un petit peu d'ancienneté quand on l'accompagne, qui est issue d'un laboratoire d'une école d'ingénieurs qui s'appelle Optacare, qui elle, gère par exemple, elle propose des solutions d'optimisation organisationnelles pour les établissements de santé. L'objectif pour eux, c'est apporter une innovation dans la gestion des flux de patients et d'optimisation des ressources, par exemple pour un hôpital ou une clinique, afin de gagner du temps et que le parcours patient soit plus optimisé pour lui, et également plus optimisé pour l'opérateur de santé. »
Julien Redelsperger : « Donc c'est quoi, c'est réduire les temps d'attente aux urgences par exemple ?
Michaël Noblot : « Réduire les temps d'attente, c'est améliorer le temps de traitement, c'est que toute la chaîne logistique du patient, ça permet d'être mieux optimisé pour gagner du temps et surtout anticiper par des programmes prédictifs de l'afflux de patients à certains moments de l'année. Parce qu'on sait qu'on est le 14 juillet par exemple en France et on sait qu'à ce moment-là, il va faire peut-être plus chaud dans trois jours parce qu'on le voit dans les prévisions. On sait qu'il y aura un flux de patients aux urgences un peu plus important, donc on anticipe la présence des personnels à l'afflux des urgences pour être le plus optimisé possible, c'est-à-dire avoir le bon nombre de personnels pour que le parcours patient soit mieux, parce qu'il est pris en charge plus rapidement, et éviter d'avoir éventuellement des médecins ou des professionnels de santé qui soient sous-utilisés, je ne sais pas si c'est le bon terme, mais en tout cas mal affectés parce qu'il n'y a pas de patients qui viennent. Donc l'objectif, c'est un exemple, c'est de faire du prédictif pour mieux optimiser l'ensemble de la chaîne et puis rendre le parcours patient le plus fluide possible, parce qu'on se souvient tous quand on va dans un hôpital qu'on attend d'une heure… »
Julien Redelsperger : « Et une heure, ce n'est pas beaucoup !
Michaël Noblot : « Et une heure, ce n'est plus… ou trois heures ou six heures, ça nous arrive tous de l'avoir en tête, mais on oublie qu'à un moment donné, l'objectif, c'est d'avoir le médecin qui soit là, le médecin, quand il intervient, il faut qu'il soit dans les meilleures conditions, ou le chirurgien pour s'il y a une opération en ambulatoire ou une opération chirurgicale. Donc l'objectif, c'est vraiment d'anticiper. Il y a des choses, et notamment les urgences, c'est des choses qui sont difficiles à anticiper par nature parce que l'urgence, on ne la connaît pas avant qu'elle arrive. Donc l'objectif, c'est d'anticiper par différents paramètres, notamment la météo, mais pas seulement, parce qu'on sait que si il gèle à -15°C et que le sol est humide, il y aura certainement plus de glissades sur les parkings, sur la route, etc. Donc c'est toute cette optimisation. »
Julien Redelsperger : « Et tout à l’heure, tu parlais de radiographie. C’est la même entreprise ? »
Michaël Noblot : « Non, c'est une autre entreprise. Alors ce n'est pas chez nous, mais on le voit se développer ailleurs. Aujourd'hui, l'intelligence artificielle générative notamment arrive à scanner en grand flux notamment des radios pour, par exemple, détecter des tumeurs. Et l'œil de l'humain s'avère moins performant à terme que l'œil de l'intelligence artificielle, même s'il est complémentaire aujourd'hui, mais on voit qu'un moment, enfin les professionnels de santé le pressentent bien, c'est que l'œil de l'intelligence artificielle sera un outil complémentaire. Alors est-ce qu'il va le remplacer ? Je ne sais pas aujourd'hui, mais en tout cas un outil complémentaire pour aller à l'essentiel pour un professionnel de santé, notamment quelqu'un qui est à l'œil en termes de radiologie. L'objectif, c'est d'aller vraiment sur l'essentiel. Et aujourd'hui, ça entoure des points particuliers d'observation pour les radiologues. Demain, est-ce qu'ils vont faire le travail à la place ? Je ne sais pas, mais je viens par exemple sur un autre projet que nous on accueille qui s'appelle Doctilia. Aujourd'hui, on a une entreprise qui s'appelle Doctilia, donc que l'on accueille chez nous, et qui est un agent conversationnel de pré-diagnostic médical. C'est-à-dire qu'il ne donne pas le diagnostic aux patients, il donne le diagnostic au professionnel de santé, le pré-diagnostic, mais l'objectif, c'est de faire gagner du temps également aux professionnels de santé par différents items d'entrée. Ça permet que le professionnel de santé qui a un temps médical disponible limité, d'aller à l'essentiel et de pouvoir optimiser son temps par le fait que l'intelligence artificielle fait un pré-diagnostic, qui n'est pas le diagnostic, qui n'est pas donné aux patients, mais qui permet de rendre le professionnel de santé plus efficace dans son acte de santé. »
Julien Redelsperger : « D'accord, ok. Donc ça, c'est sur la partie plus médicale. Tu parlais aussi de logistique, de supply chain. Un exemple concret à me donner ? »
Michaël Noblot : « Optacare, ils interviennent aussi dans la partie logistique que j'évoquais, mais il y a par exemple une troisième entreprise qu'on accueille aujourd'hui qui s'appelle Confidia, qui elle, par exemple, est dans le développement informatique, elle contrôle le code qui est développé par les développeurs et par son intelligence artificielle arrive à identifier si la documentation du programme est bien réalisée ou mal réalisée, ce qui permet d'assurer une continuité lorsque les développeurs se succèdent ou quand il y a besoin de faire évoluer les offres. Et ça, c'est quelque chose de, en général, très fastidieux à réaliser. Et l'avantage de l'intelligence artificielle, c'est de gagner du temps et d'aller sur les points saillants et que le développeur complète ou l'intelligence artificielle va proposer même une solution. Donc c'est une entreprise qu'on accueille aujourd'hui pour rendre plus efficaces les développeurs informatiques qui sont également des compétences rares aujourd'hui et complexes à avoir, ce qui permet à eux de se consacrer également au développement. La documentation, en général, ce n'est pas, on va dire, leur plus grande des qualités. En tout cas, ils s'optimisent moins là-dessus. Et donc l'objectif, c'est d'être complémentaire et d'offrir une offre, d'avoir une offre pour l'entreprise qui fait du développement informatique, de pouvoir gagner du temps en termes de développement par la documentation de qualité faite par l'intelligence artificielle, en tout cas complémentaire par l'intelligence artificielle. »
Julien Redelsperger : « À la technopole, un de vos rôles est lié à l’accompagnement et au conseil. Aujourd’hui, je peux pratiquement demander à CHatGPT de faire ce job. Je lui dis, j’ai un projet de création d’Entreprise… donne moi les conseils, les bonnes pratiques pour lancer mon entreprise. Est-ce que tu vois ça comme une menace par rapport au travail que tu fais à la technopole ou est-ce complémentaire, ou est-ce que ça ne change rien, car la composante humaine reste importante ? »
Michaël Noblot : « Alors, par expérience dans le domaine de la création d'entreprise, de l'innovation, de la startup, il y a le projet qui est important, donc la technique, le projet qui est important. Mais ce qui est essentiel, c'est les humains, on va dire, qui la composent et qui mènent le projet. Et par expérience, je pense que nous, notre valeur ajoutée en tant que structure d'accompagnement, bien sûr, c'est travailler sur le projet avec le porteur ou les porteurs ou l'équipe qui porte le projet, clairement. Et ChatGPT peut peut-être aussi apporter un élément complémentaire, si on prend l'exemple de ChatGPT, qu'on utilise nous par ailleurs, enfin, on n'est pas les seuls. Et puis les projets aussi l'utilisent, enfin, aujourd'hui, c'est clairement dans notre type de porteur de projet, c'est assez évident pour eux. Mais nous, on est très complémentaires sur tout ce qui est les sciences molles, la partie savoir-être, qui est quand même aujourd'hui quelque chose d'essentiel pour réussir ou pas, que ce soit un projet de création d'entreprise, s'investir professionnellement ou personnellement quelque part, c'est le savoir-être qui va être différenciant. Et nous, ce que l'on accompagne, ce ne sont pas des projets, ce sont des individus en fait, même si ce sont des projets sur la finalité, mais c'est des individus qu'on accompagne. Et toute la différence, c'est d'arriver à leur transmettre les points de vigilance à avoir sur un projet. Nous, la grande force que nous avons, c'est que nous, on accompagne au quotidien, actuellement, on accompagne 60 startups. On a 60 startups qu'on accompagne, il y a des stades de maturité très, très différentes. Et nous, l'avantage, c'est que tous les ans, on accompagne 60. Le porteur de projet, quand il arrive, c'est peut-être sa deuxième startup, son deuxième projet ou sa troisième, mais ce serait déjà beaucoup, mais souvent, c'est son premier projet. Et donc, nous, on a ce savoir-faire qui est vraiment important, de connaître les écueils qu'il va y avoir, différents écueils. Et c'est bien sûr, les domaines d'activité, les écueils sont différents, mais il y a des écueils qu'on retrouve, c'est savoir s'entourer, c'est savoir s'associer, qui est un enjeu fort, pour trouver des compétences complémentaires. La force, c'est à un moment donné, c'est savoir vendre et trouver de marché, et avoir un modèle économique qui fonctionne, c'est savoir s'entourer par des ressources humaines, soit par un associé, mais soit aussi par le recrutement. C'est tout ce savoir-faire, aller dans le bon labo, créer des partenariats. Et ça, je pense que c'est avant tout un humain, quelqu'un d'individu qui peut le transférer. Est-ce que dans 10 ans, il n'y aura pas une intelligence artificielle, qui sera plus performante que nous ? Peut-être. »
Julien Redelsperger : « D'accord. En tout cas, pour l'instant, l’IA générative ne va pas prendre ton job… »
Michaël Noblot : « On apporte, nous, un écosystème global, avec un lien avec l'enseignement supérieur, un lien avec des industriels locaux, parce que notre objectif, c'est d'amener, à un moment donné, le projet qui nous accompagne à prouver que son idée, son concept fonctionne, donc il faut faire des preuves, et les preuves, on les fait avec des industriels locaux, enfin, des industriels ou des entreprises locaux ou moins locaux, mais en tout cas, selon les projets, on essaye de favoriser ceux-là. Et ça apporte aussi de la créativité, d'innovation dans les entreprises dites plus traditionnelles, qui ne sont pas forcément des startups, qui elles-mêmes doivent aussi se remettre en cause en permanence pour évoluer sur leurs produits, leurs projets et leurs salariés. C'est un des points de départ pour nous, c'est-à-dire que nous avons besoin de plus de créativité, de plus de créativité, de plus de créativité, et de plus de créativité pour pouvoir faire des projets, et de plus de créativité pour pouvoir faire des projets, et de plus de créativité pour pouvoir faire des projets, et de plus de créativité pour pouvoir faire des projets. Et donc, on a besoin de plus de créativité, de plus de créativité, et de plus de créativité pour pouvoir faire des projets. Et donc, on a besoin de plus de créativité pour pouvoir faire des projets.
Julien Redelsperger : « Tu accueilles une soixantaine de startups. Est-ce que cette vague de l’IA a incité les entrepreneurs à pivoter, à revoir leurs business models, voire à recruter. Comment est que les entreprises que tu héberges s’adaptent ? Est-ce que cette vague de l'intelligence artificielle, est-ce que vous en parlez entre vous ? »
Michaël Noblot : « Alors, clairement, nous, on fait plus que d'en parler, on les incite à se questionner, certaines se questionnent depuis longtemps, enfin, ou ont déjà intégré des composantes et des briques d'intelligence artificielle dans leur entreprise. Moi, je connais des startups que l'on a accompagnées, qui ont 20 ans d'existence aujourd'hui, qui font évoluer, bien sûr, les offres qu'elles vendent, parce qu'à un moment donné, il faut évoluer, et intègrent aujourd'hui l'intelligence artificielle dans ce qu'elles vendent, que ce soit en matière digitale, de communication, d'exploration, de client. Donc, ça, c'est clairement, enfin, c'est la qualité de tout entrepreneur, je pense, de s'adapter aux évolutions et d'intégrer ce qui, je pense, est une offre de valeur dans son produit ou son service. Donc, ça, on le retrouve. Et nous, ce que l'on fait aujourd'hui, c'est qu'on a initié le premier salon de, enfin, on a été partenaire du premier salon de l'intelligence artificielle du Web3 dans l'Aube au mois de septembre l'année dernière, avec des partenaires locaux, des entreprises avec qui on travaille, qui voulaient sensibiliser à l'IA. Et je pense que ça fait partie de notre rôle d'aider à sensibiliser à l'intelligence artificielle sur notre territoire. Et on l'a fait avec des acteurs locaux. Ça, c'est l'un des éléments. L'autre élément, c'est que sur la Technopole, notre job, c'est également de fournir du contenu auprès des porteurs de projets, de futurs porteurs de projets ou même du grand public qui est intéressé à l'entrepreneuriat. Et aujourd'hui, depuis plusieurs mois maintenant, on a une offre, ce qu'on appelle un after tech. Donc, c'est un after work quelque part sur la thématique de l'intelligence artificielle qui a lieu tous les mois et le prochain a lieu dans quelques semaines. Et ça permet également à la fois aux startups qu'on accompagne, qui sont déjà là depuis longtemps, de s'intéresser au sujet de l'intelligence artificielle, d'apporter une réflexion, mais également aux entreprises du territoire ou au quidam, on va dire, ce n'est pas péjoratif dans mes propos, de s'ouvrir également sur l'intelligence artificielle puisque moi je suis persuadé et on est beaucoup à être persuadé que c'est déjà où ça va être encore plus une composante essentielle de notre environnement, que ce soit professionnel, mais également à titre personnel.
Julien Redelsperger : « L’intelligence artificielle est un sujet qui existe depuis 50 ou 60 ans. J’ai l’impression qu’on parle énormément d’IA à cause ou grace à ChatGPT avec la vague de l’IA générative. Pour toi, est-ce une bulle technologique ou une vraie tendance de fond avec une capacité transformative forte ? Comment tu vois les choses ? »
Michaël Noblot : « Alors pour la partie entreprise, clairement, pour moi c'est un vrai changement de paradigme de mode de fonctionnement à intégrer dans les entreprises au sens large, pas que les startups, mais toutes les entreprises vont être impactées aujourd'hui par l'intelligence artificielle. C'est pour certains, et pour ceux que l'on a nous en contact pour les startups, c'est des vraies opportunités d'innovation qui leur permettent aussi d'offrir des services qui n'étaient peut-être pas potentiellement existants avant. C'est-à-dire que ça crée également de nouvelles capacités de réponse à des besoins qui étaient existants, mais on ne savait pas y répondre. Donc ça, c'est une réalité. Ça permet aussi aux entreprises, soit aux startups, soit à d'autres, également de développer un avantage compétitif. C'est encore vrai aujourd'hui, peut-être que dans cinq ans, l'IA sera partout et sera utilisée à différents degrés. Je pense que c'est une histoire d'usage qui va... Il y en a certains qui vont générer de l'IA et d'autres qui vont l'utiliser. Donc aujourd'hui, on a beaucoup d'utilisateurs d'IA. Ils utilisent des briques, ce que j'évoquais tout à l'heure. Mais ça, c'est un vrai enjeu. L'enjeu le plus important est certainement la partie éthique et sociale, qui n'est pas évidente aujourd'hui pour les entrepreneurs, mais nous, ce qu'on demande aux entreprises, quels qu'elles soient aujourd'hui aux entrepreneurs, c'est d'intégrer cette dimension éthique et sociale dans leurs projets. Puisqu'aujourd'hui, les investisseurs, les partenaires qui vont aller chercher financièrement, leurs futurs salariés ont également cette composante de c'est quoi la vision de l'entreprise ? C'est quoi le métier ? C'est quoi ma mission dans l'entreprise ? C'est quoi la mission de l'entreprise ? Et l'IA, ou d'autres sujets, mais l'IA en fait partie certainement plus que d'autres, c'est quelle valeur éthique, en utilisant l'IA, je véhicule ? Ou quelle vigilance il va falloir avoir ? Et là, aujourd'hui, le législateur est toujours en retard. C'est tout à fait normal, puisqu'on est aux prémices. Et certainement, ça va être l'enjeu le plus fort des mois et années qui arrivent, c'est cet enjeu éthique. On a eu cet enjeu-là il y a une quinzaine, une vingtaine d'années sur les biotech. Quand ça arrivait également, c'est comment on utilise le vivant pour faire des recherches, pour valoriser également. Donc, il y a eu des choix de faits au niveau européen, au niveau français, qui sont des choix très différents d'autres pays. Mais sur l'intelligence artificielle, on est exactement, je pense, proche des mêmes sujets sur les données, sur l'usage des données, sur ce qu'on va en faire, les algorithmes, comment ils vont... Déjà, ils sont très présents aujourd'hui. Ils aident aussi à orienter l'information, notamment, mais pas uniquement. Et comment, demain, on arrive à intégrer ce sujet éthique ? Je ne sais pas si c'est forcément une problématique, mais en tout cas, c'est un sujet vraiment éthique et social parce qu'il y a aussi des incidences, certainement, d'évolution de compétences. On peut se poser la question sur le fait de se dire, est-ce que ça va détruire dans l'emploi ? Probablement, certains emplois, certains métiers vont disparaître, mais il y en a d'autres aussi qui vont se créer. Et après, c'est faire le lien et arriver à faire évoluer, en termes de compétences, des personnes qui... Et c'est ça, c'est l'enjeu certainement social et sociétal le plus fort pour nos sociétés. »
Julien Redelsperger : « Je ne l’ai pas précisé, mais tu as aussi un rôle à jouer en matière de formation et d’enseignement supérieur. Tu as travaillé et tu travailles pour un groupe d’enseignement supérieur. Quelle est ta vision des choses ? Es-tu inquiet pour certains métiers qui peuvent disparaitre. Comment tu vois l’évolution du marché du travail et quels conseils donnerais-tu aux entrepreneurs ou aux personnes qui se lancent sur le marché du travail.
Michaël Noblot : « Déjà, je pense qu'il faut être curieux et qu'il faut s'intéresser à l'intelligence artificielle dans tous les cas. Je pense que, qu’elle que soit l'intelligence artificielle, il y a d'autres sujets dans lesquels on peut s'intéresser, mais moi, je pense que le savoir-être va être vraiment quelque chose d'essentiel pour se démarquer. La curiosité, s'intéresser à l'intelligence artificielle, comprendre les mécanismes. C'est important de comprendre comment fonctionne l'intelligence artificielle et les intelligences artificielles, parce qu'on parle souvent d'intelligence artificielle, mais il y a différents modes qui existent. Donc, la curiosité est quelque chose d'important, je pense. S'intéresser à ce sujet-là est quelque chose d'important, qu'on soit jeune ou moins jeune, mais en tout cas, je pense que c'est important. Les enjeux éthiques, bien sûr, vont exister. Pour moi, je vois ça plutôt comme une opportunité, même si, comme tout mouvement... Je pense qu'on est en forme de révolution industrielle, une forme de révolution d'évolution. C'est plus qu'une évolution, c'est vraiment une révolution. Je pense qu'on est tout au début, en plus d'un changement de fond que je parlais tout à l'heure, des changements de paradigmes pour les entrepreneurs, je pense qu'on en est là. Et pour moi, c'est une opportunité. C'est vraiment une source de richesse. Bien sûr, il y a des points de vigilance à avoir sur l'éthique, mais c'est une source de richesse parce qu'il ne faut pas oublier que cette intelligence artificielle ne se crée pas toute seule. Elle se crée par l'humain qui l'a créée, qui l'a développée. Après, le risque, je pense, que l'on voit dans la science-fiction, dans certains films, c'est aussi de se dire est-ce que l'humain va réussir à la maîtriser, cette intelligence artificielle ? Et là, c'est le cadre qu'on va y donner en termes éthiques. Je pense que c'est le cadre qu'on saura donner ou pas donner qui va permettre de maîtriser ou de donner des limites. Enfin, je ne sais pas quel est le bon terme. Mais en termes d'emploi et de travail, je pense que c'est plutôt une opportunité. Ça va poser des questions également éthiques, globales sur le sens de l'engagement. Et ça va être là où les entrepreneurs vont avoir un vrai sens à donner du sens à ce qu'ils font, à ce que font leurs salariés également. Et qu'ils seront peut-être plus salariés en plus de main. Il y a aussi ces émotions-là qui existent de plus en plus. Dans certains pays, c'est plus craignant que dans d'autres, en France en particulier. Mais il y a cette évolution-là qui va arriver. Et pour moi, l'humain va devenir vraiment paradoxalement le centre d'un certain nombre de sujets, puisque sinon il ne va plus s'investir comme il devrait s'investir dans son entreprise. Il va s'investir de façon différente. Et je crois que l'intelligence artificielle va contribuer à accélérer ce phénomène-là qui est déjà existant aujourd'hui. »
Julien Redelsperger : « Est-ce que tu vois une dimension générationnelle dans la capacité à comprendre l’intelligence artificielle ? Est-ce que les plus jeunes, les porteurs de projets ou les étudiants sont plus au fait que les dirigeants d’entreprises en poste depuis 20, 30 ou 40 ans ? Est-ce que tu vois des différences ou des nuances sur ce domaine ? »
Michaël Noblot : « Je parlerai plus de nuances en effet que vraiment de phénomène global. Je pense que naturellement, quand on est entrepreneur, on a certains points saillants qui ressortent, notamment la curiosité, l'envie, regarder ce qui se passe et s'intéresser aux tendances. Et je pense que ça, clairement, il peut y avoir un phénomène de tendance qui est un peu plus éloigné de ce qu'on a vu au début. Il peut y avoir un phénomène générationnel et surtout, c'est plus un phénomène, je pense, lié à l'activité économique qu'on exerce pour s'y intéresser. Je pense que ce n'est pas qu'un phénomène générationnel, mais surtout un phénomène d'activité économique. Il est évident que pour les moins de 40 ans, c'est un peu plus naturel que pour les plus de 40 ans ou les plus de 50 ans, les plus de 60 ans, même s'il y a des plus de 50 ans qui s'y intéressent beaucoup. Donc, ce n'est pas qu'une question d'âge. C'est une question de curiosité, je pense, par nature. Et d'identifier, je pense que l'une des qualités d'un entrepreneur, c'est d'identifier les tendances, les signaux faibles et les tendances fortes qui vont arriver. C'est cette qualité-là qui fait que des dirigeants s'adaptent et que leurs entreprises évoluent et qu'elles perdurent. 20 ans, 50 ans, 3 siècles pour certaines, pas beaucoup, mais quelques-unes. C'est cette capacité-là à s'adapter. Mais c'est vrai que pour les plus jeunes aujourd'hui et notamment pour ceux de l'incubateur étudiant ou des startups qu'on accompagne ou qu'on a créé, c'est une composante qui est évidente pour eux, même s'ils sont plus dans l'usage de l'intelligence artificielle, dans l'utilisation de briques, que dans le développement. Parce que le développement d'intelligence artificielle est quelque chose de lourd, d'investissement, donc ils utilisent plutôt des briques qui vont se monnayer de plus en plus, parce que ceux qui les développent, ils ont aussi un modèle économique. D'où l'intérêt pour les startups de bien identifier comment eux, ils créent de la valeur également, eux-mêmes, dans l'usage de cette intelligence artificielle qui est disponible. Donc c'est vraiment tout ce... Mais oui, il y a une sensibilisation qui existe, qui est plus prégnante aujourd'hui qu'il y a 10 ans. C'est vrai que le phénomène ChatGPT en 2022 a été certainement un point de départ très très fort pour que le grand public s'y intéresse. Il y a des philosophes qui s'y intéressent. Aujourd'hui, c'est assez collectif. »
Julien Redelsperger : « C'est intéressant ce que tu dis, parce qu'effectivement l'usage est plus facile que la création et la particularité de la Technopole, je crois que c'est que vous êtes sur le même campus que l'Université de Technologie de Troyes, l'UTT, qui est une très grande école d'ingénieurs. Est-ce qu'il y a des partages de connaissances, d'expertise, des projets qui sont en lien avec l'intelligence artificielle ? »
Michaël Noblot : « Aujourd'hui, on a en effet l'Université de Technologie qui est sur le même site. Ça c'est important. On a aussi deux autres écoles d'ingénieurs, l’ESTP, l'École Spéciale de Travaux Publics, et l'EPF, qui est également une école d'ingénieurs, qui est sur le même site. On a YSchools, qui est un autre établissement plutôt dans le management de tourisme et le design, qui est un élément essentiel, je pense, également, demain dans la valeur, aujourd'hui et demain, dans la création de valeur pour les entreprises. On a l'Université de Reims, on a le CFAI, on vient avec la métallurgie, on a le lycée Saint-Jo, donc on a tous ces acteurs-là qui sont vraiment en grande proximité, voire sur le même campus ou pas très loin. Et pour répondre à tes questions sur les échanges, oui, on a des échanges, on a des interventions croisées qui interviennent. Nous, on intervient auprès des enseignants, auprès de l'école doctorale, pour parler d'entrepreneuriat, parce que c'est quand même notre cœur de métier, c'est l'entrepreneuriat, pour en parler, pour sensibiliser. On fait des événements étudiants, trans-établissements, pour que, en fait, nous, on croit beaucoup aux rencontres et on pense que l'innovation se crée par la rencontre de personnes qui ont des profits différents, des personnalités différentes. D'où l'intérêt de notre incubateur étudiant transversal pour créer cette valeur-là. Donc, on crée des événements pour, justement, que ces étudiants se croisent, pas simplement dans les soirées, mais à d'autres moments, pour créer des entreprises ensemble, créer des projets, pour se lier avec quelqu'un qui a un projet, mais qui ne sait pas trop comment s'y prendre sur une partie. Donc, ça, c'est un enjeu fort. Et, bien sûr, avec les établissements, aujourd'hui, on a des liens très forts, puisque nous, on demande... Il y a des projets... Enfin, nous, l'objectif, c'est aussi de détecter des projets qui viennent des établissements d'enseignement supérieur, et notamment, les écoles d'ingénieurs que je citais, et l'université de technologie de Troyes, en particulier, sont très présentes sur le digital, sur le numérique, sur l'intelligence artificielle, dans différents domaines, dans les laboratoires, dans différents domaines. Et certains projets, j'évoquais tout à l'heure Octacare, qui est une entreprise issue d'un labo de l'UTT, portée par un doctorant qui a créé cette entreprise, il a 10 ans aujourd'hui, enfin, il a 10 ans depuis quelques mois, quelques semaines, maintenant. Mais, c'est clairement... L'objectif pour nous, c'est aussi d'accompagner ces projets-là, dire que l'entrepreneuriat est possible également pour un étudiant, pour un doctorant, parce que ce n'est pas forcément naturel pour quelqu'un qui obtient un diplôme d'ingénieur de dire "je vais créer mon entreprise" pour plein de raisons, mais notre objectif à nous, c'est de susciter cet intérêt, de créer, de semer, pour un doctorant c'est la même chose, de semer une petite graine, et cette graine va pousser, et peut-être qu'à l'issue de ses études, il va créer son entreprise, ou 2 ans, 3 ans, 10 ans après, une fois qu'il aura fait son expérience professionnelle, de se dire "l'entreprise c'est possible pour moi, ici ou ailleurs, peu importe le lieu, c'est pas ça notre sujet, même si on préférerait qu'il y a chez nous, mais dans tous les cas, c'est créer ces graines d'entrepreneuriat, et oui, l'intelligence artificielle fait partie des préoccupations de l'enseignement supérieur au sens large, en termes d'enseignement, il y a une remise en cause de l'enseignement, mais également dans le terme d'évolution de recherche, pour l'appliquer à l'entreprise demain. »
Julien Redelsperger : « Tous les grands acteurs de l’IA sont américains. Pourquoi est-ce qu'en France, selon toi, on n'a pas de géant de l'IA, pourquoi est-ce que ChatGPT n'a pas été créé, développé en France, pourquoi est-ce que Nvidia, Facebook, Meta, etc., n'ont pas été développés en Europe ? Est-ce que tu as des éléments de réponse qui nous permettraient de comprendre ce boom notamment de l'IA, qui est plutôt côté américain ? »
Michaël Noblot : « Je pense que ce que tu évoques, c'est exactement ce qu'on a vécu il y a quelques mois, années maintenant, parce qu'on peut parler d'années, pour les vaccins, les fameux vaccins pour le COVID-19, où on se rend compte que les entreprises qui ont développé ces vaccins sont des entreprises non européennes, pour la grande majeure partie, mais créées par des Français, par des chercheurs ou des entreprises françaises, par des entreprises dirigées par des Français, à l'étranger. Et je pense que c'est exactement la même chose, c'est qu'on a du mal, en France et en Europe, je pense que ce n'est pas que français, malheureusement, de retenir nos talents, parce qu'on ne sait pas les retenir, on n'arrive pas à les retenir, globalement, suffisamment, je pense qu'on arrive encore. »
Julien Redelsperger : « C'est quoi, c'est pour des questions de salaire uniquement ? D'argent ou de compétences ? »
Michaël Noblot : « Je pense que, pour parler pour la France, on a des très très belles grandes écoles, on a un phénomène, on a un modèle qui est assez unique dans le monde, qui est le phénomène des grandes écoles, que ce soit d'ingénieurs ou de management, la preuve, c'est que les talents partent à l'étranger, donc c'est vraiment, je pense que c'est une grande particularité, et à la fois, on n'arrive pas à les retenir, certainement pour des questions financières, mais pas uniquement, je pense que c'est plus des fondements autour de la liberté, ou de sentiments de liberté, ou d'absence de liberté, ou de cadres un peu rigides, ou de carcans, qui existent en France ou en Europe, et c'est plus, je pense, pour ces motifs-là. Après, pour certaines entreprises, c'est aussi un sujet de prise de risque au niveau financier, c'est-à-dire que on arrive à faire des levées de fonds jusqu'à un certain montant, et des fonds, à un moment donné, sont limités également en France et en Europe, même s'il y a certains plans qui ont été mis en place par le gouvernement français pour répondre à, pour développer des licornes, qui est un vrai enjeu économique européen et français. Donc, il y a également cette explication-là d'accompagner le risque et d'arriver à accompagner le risque le mieux possible, et je pense que là, on progresse beaucoup, aujourd'hui, l'entrepreneuriat est quelque chose qui existe dans les établissements d'enseignement supérieur, qu'ils soient privés ou publics, peu importe lesquels, ça existe, pas suffisamment certainement encore, mais la prise de risque est une possibilité, et même est vécue aujourd'hui plus positivement qu'il y a cinq ou dix ans, où la prise de risque voulait dire potentiel échec, et l'échec est quand même quelque chose de compliqué, on peut le dire dans notre mode francophone, là où l'échec peut être vécu comme une expérience positive, ici, c'est moins vrai aujourd'hui, mais en tout cas, pouvait être encore vécu comme une expérience qui te grave à vie. »
Julien Redelsperger : « Est-ce que ça fait partie des enseignements que vous partagez ? Tu parlais notamment de l'incubateur étudiant ou des établissements d'enseignement supérieur… »
Michaël Noblot : « Quand on parle d'entreprenariat, notamment aux étudiants, surtout à ceux qui n'ont pas de projet au moment où on leur en parle, parce que l'objectif c'est d'en parler très tôt à des étudiants de 18, 19 ans, donc vraiment très très tôt, c'est de leur dire, cette expérience entrepreneurial que vous avez peut-être menée un jour, vous-même par rapport à votre projet, ou en vous associant à l'un de vos camarades de classe ou d'une autre école, parce que l'objectif c'est aussi avec une autre école, de mener ce projet, qu'il aille à terme ou pas, qu'il se développe, qu'il se développe très très bien, ou même si vous plantez, cette expérience sera unique. C'est-à-dire que vous allez mettre votre énergie dans un projet entrepreneurial, vous allez réussir à développer de nouvelles compétences qui seront valorisables demain dans un nouveau projet entrepreneurial ou dans une entreprise, et ça vos parties prenantes demain de l'entreprise, que ce soit vos financeurs, que ce soit vos futurs associés, vos futurs recrutés, ça c'est quelque chose que vous valoriserez demain. Ça c'est clairement quelque chose d'essentiel et je le dis parce qu'on y croit, mais c'est clairement parce qu'on y croit de pouvoir arriver à transférer ce risque d'appréhension qu'ils n'ont pas forcément à 18, 19 ans. Cette appréhension-là, c'est pas eux, leurs parents peuvent leur véhiculer, parce que leurs parents ont aussi leur représentation et leur influence, mais pour les plus jeunes, c'est vraiment de leur expliquer que toute expérience entrepreneuriale qu'elle soit réussie ou pas, et on a aussi des expériences entrepreneuriales qui ne réussissent pas, sinon ce serait étrange et étonnant.
Julien Redelsperger : « Ça fait partie des règles du jeu de l'entrepreneuriat... »
Michaël Noblot : « C'est une partie des règles de se dire, à un moment donné, j'ai un super projet, et parfois c'est pas lié au projet, ni à la personne qui le conduit, c'est aussi des phénomènes extérieurs où un autre acteur se met sur le marché un peu plus tôt que moi, et malheureusement, quand j'arrive, c'est trop tard, ou je suis là trop tôt. L'inverse existe aussi. Le marché n'était pas mûr, je suis là trop tôt et je m'épuise. À un moment donné, j'épuise mes ressources et je suis obligé d'arrêter, alors que deux ans après, il y a un autre acteur qui arrive et qui va plus vite, et qui arrive. Parce que l'environnement législatif, l'état d'esprit a évolué, et c'est une possibilité, mais c'est pas grave. C'est quand on a eu cette expérience-là, on y arrive. Moi, j'ai des entrepreneurs que je connais, qui ont parfois arrêté leur entreprise, qui trouvent des super jobs de directeurs généraux demain, ou qui se réinvestissent dans un autre projet d'entreprenariat en tant qu'associés ou salariés. Et ça, c'est toujours quelque chose de valorisable, et valorisant, je trouve, de plus en plus. En tout cas, ça existe. C'est cet état d'esprit, c'est quelque chose qui évolue, mais un état d'esprit, ça n'évolue pas en 5 ans ou en 10 ans, c'est vraiment un état d'esprit qui évolue sur le long terme. Et le développement de l'auto-entrepreneuriat en France, qui est quand même... Moi, je m'interrogeais à un moment donné, et je trouve que c'est vraiment cette force-là, de faire toucher l'entrepreneuriat, on va dire, le grand public, et c'est pas péjoratif quand je le dis, de voir la réalité également, c'est quoi une entreprise. Et la réalité d'une entreprise, c'est pas que produire son bien ou son service, c'est aussi aller le vendre, c'est convaincre, c'est faire des devis, c'est toutes les composantes de l'entreprise que l'on connaît, se faire payer également, c'est voir recruter des salariés, manager des équipes, alors des équipes internes quand c'est des salariés, mais externes quand c'est des libéraux qui travaillent avec nous. Donc tout ça, c'est une composante de compétences particulières que l'on développe au fil de l'eau et qui fait le talent d'un dirigeant, c'est d'avoir toutes ces compétences-là, de se focaliser sur l'essentiel, tout en développant son activité, son business. »
Julien Redelsperger : « Merci beaucoup Michaël. À la fin de chaque épisode, on a le plaisir du jour de répondre à une question posée par l'invité précédent, sans que celui-ci n'en connaisse le nom. En attendant d'écouter la tienne, je te laisse écouter celle de Christelle Taillardat, qui n'est pas inconnue puisqu'elle dirige l'agence départementale du tourisme de l'Aube. On l'écoute. »
Christelle Taillardat : « J'aimerais savoir si l'IA va avoir effectivement un rôle important sur la survie des langues vernaculaires. »
Michaël Noblot : « Je remercie beaucoup Christelle, que je connais en effet par ailleurs pour cette question, mais je ne connaissais pas sa question avant, donc je vais essayer d'y répondre au mieux. Donc comme je ne suis pas un spécialiste de la linguistique, je vais faire au mieux par rapport aux langues vernaculaires. Donc si j'ai bien compris, c'est essentiellement les dialectes, pour faire simple. Moi, je... Au-delà de l'IA, je pense qu'une langue elle vit par son usage. Et je ne suis pas certain que l'IA va contribuer ni à l'omniprésence de certaines langues, notamment peut-être l'anglais qui est quand même la langue aujourd'hui prépondérante en termes de économique. C'est clairement... Elle a pris... Elle a une prépondérance très très forte au niveau économique aujourd'hui. Je pense que ces dialectes, ils arriveront à... Alors je ne sais pas si l'IA pourra peut-être contribuer à les à les archiver, à les conserver dans la durée, mais je pense que c'est l'usage qu'en feront des habitants, des gens, qui permettront que ces dialectes se développent. Il y a certains territoires de France, mais c'est également vrai à l'étranger, qui ont cette typologie d'utiliser leur patrimoine. Et dans le patrimoine, il y a la langue qui en fait partie, qui l'ont conservée. Les Alsaciens, les Bretons ou les Basques sont très très forts en France sur ce domaine-là. Si vous regardez, ils ont à la fois une identité française, une identité européenne, mais ils ont également une identité bretonne, basque ou alsacienne qu'ils ont conservée, et la langue est un moment de dialogue, et je pense que ça c'est l'humain qui en fera l'usage, qui permettra de la conserver. L'IA pourra être peut-être un moment de réceptacle, de conservation, mais sera pas ni dans un sens, ni dans un autre, ne va ni développer, ni les tuer. Je pense qu'après c'est leur langage du business qui reste aujourd'hui l'anglais, qui est clairement une langue prépondérante, et qui va rester probablement prépondérante dans la durée. »
Julien Redelsperger : « Et tous les grands modèles de langues utilisés par l'IA sont principalement en anglais, et on le voit beaucoup aujourd'hui… »
Michaël Noblot : « Tout à fait. »
Julien Redelsperger : « Ok, parfait. Écoute, Michaël, merci pour ta réponse. Alors maintenant, à toi, quelles questions est-ce que tu aimerais poser au prochain invité ?
Michaël Noblot : « La question que je souhaite poser, c'est que lors des échanges qu'on a pu avoir, que l'IA pouvait contribuer à certaines optimisations dans le domaine du transport, ou dans la prédiction éventuellement de certaines choses, notamment où on peut imaginer que l'IA va nous aider à éviter ou à prédire des catastrophes naturelles à venir, et néanmoins si on prend un peu d'altitude là-dedans, une vision un peu plus large, et plus globale, la question que je vais poser c'est est-ce que vous pensez, ou tu penses, si je tutoie ou pas la personne à l'interview pour le futur, que l'IA sera un remède aux enjeux climatiques et environnementaux, ou un accélérateur de la dégradation de la situation actuelle et future ? »
Julien Redelsperger : « OK, c’est un grand débat. En tout cas, je garde la question, je la poserai au prochain invité. Merci beaucoup de ta participation. Michaël, je rappelle que tu es directeur délégué de la Technopole de l'Aube en Champagne. Merci beaucoup d'avoir participé à ce podcast. »